République démocratique du Congo : alors que le conflit fait rage, les équipes de MSF luttent contre les épidémies
Les épidémies se propagent alors que le financement de l’assistance diminue, créant une surcharge sur les systèmes de santé déjà fragilisés.
Depuis le début de 2025, la République démocratique du Congo (RDC) connaît une recrudescence inquiétante d’épidémies, notamment de rougeole et de choléra. Ces épidémies surviennent dans un contexte d’escalade de la violence et de l’insécurité. En outre, la réduction des financements de l’assistance humanitaire est source de préoccupations croissantes. Les ressources nécessaires pour contenir ces épidémies sont déjà gravement insuffisantes.
Depuis des mois, la rougeole et le choléra ne cessent de se propager à travers le pays. Au début juillet, plus de 36 150 cas suspects de rougeole et 565 décès avaient été signalés dans presque l’ensemble des 26 provinces, ainsi que 33 864 cas de choléra ayant entraîné 757 décès.
« Partout, nos équipes font face au même constat. Tout manque et les foyers épidémiques se multiplient. »
– Emmanuel Lampaert, représentant de MSF en RDC
La RDC a déjà connu des épidémies plus importantes par le passé. Toutefois, la pénurie actuelle de ressources et de vaccins, conjuguée aux difficultés logistiques et sécuritaires dans l’est du pays, rend la situation actuelle particulièrement complexe et préoccupante.
« La République démocratique du Congo fait face à des ruptures fréquentes de plusieurs vaccins, dont ceux contre la rougeole et le choléra. Une pénurie de vaccins contre la rougeole pourrait compromettre les programmes de vaccination de routine », s’inquiète Emmanuel Lampaert, représentant de Médecins Sans Frontières (MSF) en RDC. « Partout, nos équipes font face au même constat. Tout manque, et les foyers épidémiques se multiplient. »
À Lomera, dans le Sud-Kivu, un programme de vaccination d’urgence a été mis en place pour faire face à la flambée de choléra. Or, faute d’approvisionnements suffisants, il n’a pas permis d’administrer une dose de vaccin par personne, alors que deux doses sont requises pour une protection optimale.

L’intervention de MSF
Au cours de la première moitié de l’année 2025, MSF a mis en place plus de 20 interventions d’urgence pour soutenir le ministère de la Santé dans la lutte contre les épidémies.
Ces interventions ont permis de vacciner plus de 437 000 enfants contre la rougeole du Nord au Sud-Kivu, de l’Ituri au Nord-Ubangi, du Maniema au Sankuru jusqu’au Grand Katanga. Elles ont également permis de soigner plus de 5 430 personnes atteintes de la maladie. En parallèle, nos équipes ont traité près de 12 800 personnes atteintes du choléra, et vacciné plus de 11 000 personnes contre cette maladie.
Toutefois, les conditions dans lesquelles se déroulent ces interventions sont souvent loin d’être optimales. Vu les nombreux obstacles, il est difficile de briser les chaînes de transmission.
« Sans investissements durables dans l’accès à l’eau potable et la mise en place d’un système efficace de gestion des déchets, le choléra continuera de faire des ravages. »
– Luiza Suarez, coordonnatrice médicale de MSF au Sud-Kivu
« À Businga, dans le Nord-Ubangi, la zone de santé faisait face à un manque criant de vaccins contre la rougeole et à l’absence d’électricité, cruciale pour réfrigérer les vaccins », explique Thomas Holibanga, responsable des interventions d’urgence de MSF à Businga. « Nous avons donc dû tout mettre en œuvre pour garantir la chaîne du froid et transporter les vaccins dans des aires parfois situées à plus de 180 kilomètres du bureau central de la zone. Les autorités locales n’avaient pas la logistique requise pour cela : motos, pirogues, bateaux à moteur, etc. »
À Lomera, le manque de vaccins contre le choléra s’accompagne de conditions d’hygiène particulièrement propices à la propagation de la maladie. « Sans investissements durables dans l’accès à l’eau potable et la mise en place d’un système efficace de gestion des déchets, le choléra continuera de faire des ravages », explique Luiza Suarez, coordonnatrice médicale de MSF au Sud-Kivu. « Il est essentiel que les autorités et les partenaires intensifient leurs efforts pour garantir des services adéquats en eau, hygiène et assainissement, pour prévenir durablement les épidémies à travers le pays. »

L’insécurité, un facteur aggravant lors des épidémies
Malheureusement, l’insécurité et le conflit en cours dans l’est du pays contribuent également à la multiplication des épidémies. En effet, ils rendent l’acheminement des vaccins et des fournitures médicales extrêmement complexe.
À Bambo et Masisi, au Nord-Kivu, des campagnes de vaccination soutenues par MSF ont été retardées en raison des affrontements. Cependant, la situation sécuritaire dans l’est n’affecte pas que les zones directement touchées par les combats.
Depuis des mois, la fermeture des aéroports de Bukavu et de Goma bloque la principale voie d’acheminement des vaccins vers l’est de la RDC. En conséquence, les réserves habituellement acheminées par avion depuis Kinshasa se sont rapidement épuisées.
Des initiatives ont été mises sur pied par les autorités et des agences des Nations Unies pour reconstituer ces réserves. Toutefois, l’acheminement requiert des moyens logistiques et financiers beaucoup plus importants, à l’heure où le financement global de l’assistance humanitaire est en forte baisse. Cette situation suscite de vives inquiétudes pour l’avenir de la RDC.
« La situation épidémiologique couplée à ces coupes budgétaires internationales est très inquiétante », conclut Emmanuel Lampaert. « Nous appelons les autorités politico-administratives et les partenaires internationaux à faire le maximum pour réduire les risques d’aggravation, en rouvrant notamment les aéroports de Goma et de Bukavu, et à garantir la sécurité des mouvements aériens et terrestres. Cela est essentiel pour répondre efficacement aux multiples urgences qui frappent actuellement le pays. »