Une femme participe à une séance de soutien collectif organisée par MSF pour les patientes atteintes d’un cancer du col de l’utérus à l’hôpital central Queen Elizabeth de Blantyre. Malawi, 2022. © Diego Menjibar
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Cinq idées reçues au sujet des soins palliatifs

Rachel Yantzi, infirmière chez MSF, explique ce que représentent réellement les soins palliatifs.

Rachel Yantzi
Infirmière

Rachel Yantzi est infirmière et technicienne de soutien mobile spécialisée dans les soins palliatifs pédiatriques et néonatals. Elle travaille avec les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) dans différents contextes afin d’améliorer la qualité des soins. Elle partage les cinq idées reçues les plus courantes au sujet de son travail et explique ce que représentent réellement les soins palliatifs.

Cela signifie l’arrêt des soins actifs

L’une des plus grandes idées reçues est que nous abandonnons les personnes malades ou que nous arrêtons des traitements qui devraient se poursuivre. Je passe beaucoup de temps à aider les gens à comprendre que nous adaptons les soins à l’état de chaque personne et à leurs priorités. Nous n’arrêtons jamais les traitements qui pourraient leur être bénéfiques. C’est très clair. 

Les gens pensent parfois que les soins palliatifs et l’euthanasie sont similaires, mais ce n’est pas du tout la même chose. Les traitements curatifs et palliatifs ne sont pas opposés et peuvent, dans de nombreux cas, être combinés.

C’est seulement pour les personnes âgées

Les gens sont surpris d’apprendre que je travaille avec des nouveau-nés et des enfants, car les soins palliatifs sont souvent considérés comme destinés aux personnes âgées ou aux personnes atteintes d’un cancer.  

L’idée que des enfants et des bébés puissent avoir besoin de soins palliatifs peut surprendre et attrister les gens. Ils peuvent penser que faire ce travail tout le temps doit être vraiment déprimant. C’est souvent très triste, mais cela peut aussi être gratifiant d’offrir un soutien au personnel qui apporte ces soins aux enfants et à leurs familles.     

Malheureusement, la mort est inévitable là où nous travaillons. Ainsi, que nous appelions cela des soins palliatifs ou non, notre personnel s’occupe de personnes en fin de vie. Mais en offrant un soutien à nos collègues, nous pouvons transformer quelque chose qui sera toujours douloureux en une expérience qui, dans de nombreux cas, peut également être valorisante. 

Dans mon travail avec une équipe néonatale au Burkina Faso, la communication avec les familles était cruciale. J’ai vu comment mes collègues ont réussi à établir une relation de confiance. Même lorsque l’issue est difficile, la famille apprécie d’avoir été bien informée et a confiance que nous avons fait tout notre possible. 

Beaucoup de mes collègues disent que cela a transformé leur façon de pratiquer la médecine. Dans le passé, lorsqu’ils avaient des nouvelles difficiles à annoncer, cela pouvait souvent être source de conflit entre l’équipe médicale et la famille. Aujourd’hui, je connais des membres du personnel médical et infirmier qui sont restés en contact avec la famille pendant des mois, même lorsque l’enfant n’a pas survécu. En communiquant plus ouvertement, ils parviennent à établir des relations solides et de confiance. 

Aliyanesa Nkunye reçoit un traitement de chimiothérapie à l’hôpital central Queen Elizabeth, à Blantyre. « Avant de commencer le traitement, je souffrais beaucoup et je ne pouvais ni manger ni dormir la nuit. Depuis que j’ai commencé, je me sens beaucoup mieux », explique-t-elle. Malawi, 2022. © Diego Menjibar

La médecine humanitaire ne consiste qu’à sauver des vies

Nous avons l’obligation morale envers les patientes et les patients de leur offrir des soins, même si nous ne pouvons pas leur sauver la vie. 

Chez MSF, nous parlons beaucoup de préserver des vies, de soulager la souffrance et de promouvoir la dignité des personnes que nous soignons. Si nous nous concentrons uniquement sur le fait de sauver des vies, nous oublions cet autre aspect qui est important pour nous. 

C’est une chose à laquelle on pense uniquement dans les pays à revenus élevés

On pourrait avoir tendance à penser que les soins palliatifs sont un concept développé dans les pays à revenus élevés, puis diffusé à travers le monde.     

En réalité, il est important de se rappeler que dans toutes les cultures à travers le monde, les gens ont leurs propres moyens de faire face à la perte d’un être cher et de prendre soin des personnes gravement malades ou en fin de vie. De bons soins palliatifs contribuent à renforcer ces capacités. 

Certaines de ces façons de faire face peuvent être perturbées lors d’une crise humanitaire due à un conflit ou à une catastrophe naturelle. C’est pourquoi il est si important de reconnaître ce que les gens font déjà et de leur offrir un soutien. 

La morphine et les opioïdes ne sont pas sécuritaires

Au Canada, nous sommes confrontés à un grave problème de consommation d’opioïdes et de dépendance à ces substances. Je comprends donc pourquoi les gens craignent ces médicaments. Mais avec un contrôle approprié, nous pouvons mettre ces médicaments à la disposition des personnes qui en ont vraiment besoin en toute sécurité. 

Certains membres du personnel médical et infirmier de MSF qui ont peu travaillé avec les opioïdes peuvent penser qu’il est très risqué de les prescrire et que les effets secondaires seront toujours importants.   

C’est une question de perception qui change souvent lorsque les membres du personnel acquièrent plus d’expérience et de confiance dans les soins de confort. Lorsqu’ils comprennent comment et quand utiliser ce type de traitement de la douleur.   

Enfin, les gens pensent parfois que les soins palliatifs se limitent à la gestion de la douleur. Il s’agit en réalité d’une approche holistique centrée sur la personne, qui traite la souffrance psychologique, émotionnelle, sociale et spirituelle.