An MSF team distributes relief items to newly arrived displaced people at the resettlement site of Eduardo Mondlane, in the town of Mueda, in the northern Mozambican province of Cabo Delgado. © Igor Barbero/MSF
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Mozambique : les attaques et la violence dans le Cabo Delgado déplacent des milliers de personnes alors que se pointe la saison des cyclones

Une récente flambée de violence dans la province mozambicaine de Cabo Delgado a forcé le déplacement de milliers de personnes déjà affligées par cinq années de conflit. Ces déplacements arrivent au moment où commence la saison des cyclones. Le Mozambique est l’un des pays les plus exposés aux phénomènes météorologiques extrêmes, avec un cycle annuel de tempêtes tropicales qui laisse peu de temps aux habitants et aux habitantes de récupérer entre les tempêtes. Une partie importante de la population de Cabo Delgado se trouve ainsi en situation de grande vulnérabilité en raison des déplacements et du manque d’accès aux soins médicaux.

La crise actuelle se concentre dans le centre de la province, en particulier dans les districts de Meluco et du sud de Macomia, où les autorités locales ont signalé, au cours des deux dernières semaines, plus de 20 attaques contre quatre villages. Ces attaques ont endommagé ou détruit par le feu 2 800 maisons. Depuis la fin du mois de janvier, plus de 14 000 personnes ont été forcées de quitter leur domicile en raison de l’escalade du conflit. Ces personnes recherchent maintenant la sécurité et des moyens de survie essentiels. Il s’agit de la plus grande vague de déplacement depuis plusieurs mois.

Insécurité persistante

« Des attaques violentes et l’insécurité persistante dans plusieurs districts du Cabo Delgado central ont chassé des milliers de personnes de chez elles avec rien d’autre que ce qu’elles pouvaient emporter, au moment même où la saison des cyclones et des pluies s’installe », déclare Raphael Veicht, chef de l’unité d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF). « C’est une combinaison très dangereuse. Nos équipes répondent aux nouvelles vagues de déplacements forcés en fournissant à la population des soins de santé de base, ainsi que des articles ménagers indispensables et du matériel pour se construire des abris. Nous sommes extrêmement préoccupé·e·s par la protection des civils et des civiles dans ce grave conflit qui s’intensifie. »

L’équipe MSF offre des consultations médicales aux personnes récemment déplacées par la violence dans le district de Meluco, dans le Cabo Delgado.
L’équipe MSF offre des consultations médicales aux personnes récemment déplacées par la violence dans le district de Meluco, dans le Cabo Delgado.MSF

La semaine dernière, la tempête tropicale Ana – la première de la saison – a touché terre dans les provinces mozambicaines de Nampula et de Tete. Les personnes déplacées dans la province de Cabo Delgado seront extrêmement vulnérables aux tempêtes tropicales à venir, car plusieurs vivent sans abri, sans eau potable ni assainissement. Les tempêtes provoquent fréquemment des inondations, ce qui augmente considérablement le risque d’épidémies de maladies transmissibles et potentiellement mortelles telles que le paludisme et les maladies diarrhéiques.

Dans le centre de la province de Cabo Delgado, de nombreuses personnes déplacées se sont maintenant rassemblées dans de petits villages, dont Mitambo, Ancuabe et Nanjua, où les équipes de MSF gèrent des cliniques mobiles et où elles ont distribué, à la fin du mois de janvier, de la nourriture, des abris et des kits d’hygiène à 800 familles. Ces villages manquent toutefois d’infrastructures de base pour subvenir aux besoins de tant de personnes, en particulier d’eau potable, d’abris et d’accès aux soins médicaux.

Cliniques mobiles pour consultations médicales

« À Mitambo, où nous avons organisé des cliniques mobiles et des distributions de nourriture, la situation était très tendue, car de plus en plus de personnes déplacées arrivaient dans le village », explique Jean-Jacques Mandagot, coordonnateur du projet MSF. « Certaines personnes dormaient dans les champs tandis que d’autres s’abritaient dans des maisons au toit de chaume laissées vides par des habitants ou les habitantes déjà partis pour un endroit plus sûr. Certaines personnes sont restées une nuit et sont reparties à la recherche de zones plus sûres, tandis que d’autres sont restées plus longtemps, car elles n’avaient pas les moyens de continuer. »

Il n’y a pas de centre de santé permanent à Mitambo et le village manque d’infrastructures essentielles, comme l’approvisionnement en eau potable, pour soutenir une population aussi nombreuse. Auparavant, les habitants et les habitantes se rendaient dans un centre de santé d’un village voisin, mais avec l’insécurité qui règne actuellement, ils et elles doivent voyager beaucoup plus loin et courir un plus grand risque, ou alors renoncent aux soins de santé, faute de moyens pour voyager ou de volonté de prendre ces risques. En conséquence, les cliniques mobiles de MSF à Mitambo étaient très occupées à la fin de janvier.

L’équipe MSF offre des consultations médicales aux personnes récemment déplacées par la violence dans le district de Meluco.
L’équipe MSF offre des consultations médicales aux personnes récemment déplacées par la violence dans le district de Meluco.MSF

« Chaque jour, notre équipe réalisait plus de 200 consultations médicales, et nous avons traité plus de 2 000 patientes et patients en une seule semaine », explique Jean-Jacques Mandagot. « Nous avons vu beaucoup de personnes atteintes de paludisme, de toux, de fièvre et de diarrhée. Aussi, plusieurs patients et patientes souffraient de douleurs physiques aux jambes et au dos à cause de leur difficile voyage pour fuir le danger. Un homme m’a dit qu’il avait perdu tous ses biens, sa maison, ses réserves de nourriture, qu’il n’avait plus rien. Il m’a raconté qu’il était maintenant obligé de mendier pour de la nourriture et qu’il ne voulait plus être près de son village, ou de n’importe quel autre endroit qui lui rappellerait la vie qu’il avait perdue. »

Le 26 janvier 2022, un village voisin de Mitambo a été attaqué et des coups de feu ont été entendus depuis le village, ce qui a poussé les gens à se déplacer plus au sud vers le village de Maua, en quête de sécurité.

Des centaines de milliers de personnes sont actuellement touchées par la violence dans la province de Cabo Delgado, violence qui s’est intensifiée au cours des cinq dernières années. Avec le début de la saison des pluies et des cyclones, l’impact cumulé des années de conflit et l’aggravation de l’urgence humanitaire, il est plus important que jamais que les équipes MSF aient un accès illimité et sûr à la zone afin qu’elles puissent fournir aux communautés les soins médicaux dont elles ont tant besoin.

« Il est crucial que les médicaments et les fournitures médicales puissent être importés rapidement, sans retard bureaucratique, afin que MSF puisse intensifier l’apport de soins de santé de première nécessité dans la province de Cabo Delgado », dit Raphael Veicht.

MSF au Mozambique

MSF travaille au Mozambique depuis 1984. Depuis plus de 30 ans, les équipes MSF répondent aux urgences médicales et humanitaires dans tout le pays, notamment le VIH/TB, la malnutrition, le paludisme, le choléra, les catastrophes naturelles, la COVID-19 et les déplacements de population provoqués par le conflit. Dans la province de Cabo Delgado, les équipes MSF répondent aux urgences et aident à combler les lacunes en matière de soins de santé pour la population hôte et le nombre croissant de déplacé·e·s, travaillant souvent aux côtés des autorités sanitaires et d’autres partenaires.