MSF Emergency room supervisor Masood Khan treats a patient for a gunshot wound at the Boost hospital. Helmand province, Afghanistan © MSF/Tom Casey
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Afghanistan : Hausse fulgurante des blessures et des déplacements alors que la violence se propage dans le pays

Depuis mai, la violence s’accentue en Afghanistan, alors que des combats se produisent autour et à l’intérieur des capitales provinciales entre les forces afghanes et l’Émirat islamique d’Afghanistan (AIE, également connu sous le nom des Talibans). Cette situation entrave l’accès aux soins médicaux, multiplie le nombre de morts et de blessés par balles et explosions, et provoque des déplacements massifs. Dans trois régions où Médecins Sans Frontières (MSF) travaille, Lashkar Gah (province du Helmand) et Kandahar au sud, et Kunduz au nord, ces conséquences se font très vivement ressentir. Les combats se poursuivent également autour de la ville d’Herat, où MSF gère également un projet.

 

« La situation dans le pays s’est détériorée au point que dans certaines villes, comme Lashkar Gah et Kunduz, les structures médicales sont dorénavant sur les lignes de front », explique Laura Bourjolly, responsable des affaires humanitaires de MSF en Afghanistan. « Dans tous nos projets, nos équipes continuent de traiter les patients, malgré les circonstances difficiles, et nous avons adapté nos activités médicales pour répondre aux besoins aigus. »

 

Masood Khan, superviseur des urgences de MSF, soigne un patient blessé par balle à l
Masood Khan, superviseur des urgences de MSF, soigne un patient blessé par balle à l’hôpital Boost.MSF/Tom Casey

À Lashkar Gah, où MSF soutient l’hôpital Boost, d’intenses combats ont lieu dans la ville depuis plus d’une semaine.  La vie est au point mort, et les soignants traitent les urgences médicales, obstétricales et chirurgicales. Le personnel reste à l’hôpital pour soigner les patients, à proximité des bombardements, des attaques au mortier et à la roquette, et des frappes aériennes. Le 9 août, une roquette a explosé dans l’enceinte de l’établissement, tout près des urgences, mais heureusement il n’y a eu aucune victime.

Patients en fuite

 

Le bruit de la guerre rend le sommeil très difficile, mais le personnel a réussi à maintenir fonctionnels tous les départements de l’hôpital à ce jour. La semaine dernière, les équipes MSF à l’hôpital Boost ont soigné de nombreux blessés de guerre et réalisé 20 interventions chirurgicales en une seule journée. De nombreuses personnes ont maintenant fui la ville et au cours des derniers jours, nous avons constaté une réduction significative du nombre de patients se présentant à l’hôpital pour obtenir des soins.

Récemment, les combats se sont intensifiés dans et autour de Kunduz, et à la fin de la semaine dernière, la ville est tombée aux mains de l’AIE. Lorsque la violence s’est intensifiée en juillet, les bureaux de MSF ont été transformés en une unité de traumatologie de 25 lits pour soigner les personnes blessées par balles, explosions et éclats d’obus. Entre le 1er et le 9 août, 127 patients ont été traités pour des blessures par balles et explosions, dont 27 enfants de moins de 16 ans. MSF continue à prodiguer des soins à l’unité de traumatologie, mais a commencé à transférer les services ambulatoires vers le nouveau centre de traumatologie de Kunduz, qui est en construction depuis 2018. MSF continue également à soutenir l’avant-poste du district de Chahar Dara, une unité de stabilisation dans un district à l’extérieur de la ville de Kunduz, qui a accueilli 126 blessés de guerre entre le 1er et le 8 août.

 

Prue Coakley/MSF En juin, de violents combats autour de la ville de Kunduz ont forcé des milliers de personnes à fuir. Quatre cents familles ont trouvé refuge dans un campement informel où les équipes MSF ont commencé à fournir 12 000 litres d
Prue Coakley/MSF En juin, de violents combats autour de la ville de Kunduz ont forcé des milliers de personnes à fuir. Quatre cents familles ont trouvé refuge dans un campement informel où les équipes MSF ont commencé à fournir 12 000 litres d’eau potable par jour.Prue Coakley/MSF

 

Dans un pays où le système de santé est dysfonctionnel, la violence affecte gravement l’accès aux soins pour la population. Dans les zones où les combats sont intenses, il est trop dangereux pour les gens de quitter leur domicile pour se faire soigner. Certains attendent à la dernière minute, alors que leur état de santé s’est déjà détérioré. Nous constatons que le nombre de patients dans nos salles d’urgence, notre centre de traitement de la COVID-19 et nos cliniques externes diminue lorsque la violence augmente. À Kandahar, où MSF gère un projet pour les patients atteints de tuberculose pharmacorésistante (TB-R), on leur offre des consultations à distance et des réserves de médicaments pour éviter qu’ils n’aient à traverser les lignes de front. Et à Lashkar Gah il y a quelques jours, le nombre de femmes enceintes demandant des soins a augmenté lorsque la situation s’est apaisée. Les urgences médicales, les accouchements et les maladies chroniques ne s’arrêtent pas en temps de guerre.

 

Soutenir les personnes déplacées

 

« Nous n’avions qu’une seule femme enceinte à l’hôpital », explique Sarah Leahy, coordonnatrice du projet MSF dans le Helmand, « mais le lendemain, quand les combats se sont un peu calmés, dix femmes enceintes ont réussi à nous rejoindre, donc nous savons qu’il y a des besoins. Nous craignons vraiment que les femmes doivent accoucher à la maison sans aide médicale disponible en cas de complications. »

Les affrontements entre les belligérants ont forcé des centaines de milliers de personnes à quitter leur foyer. Certains ont cherché la sécurité dans les zones urbaines et vivent dans des camps informels avec peu d’accès aux services de base tels que la nourriture, un abri et des soins médicaux. En juillet à Kunduz, MSF a ouvert une petite clinique offrant des consultations ambulatoires aux femmes et aux enfants déplacés à Sar Dawra et a commencé à fournir de l’eau potable aux personnes déplacées. La clinique a traité environ 300 patients par jour et début août, MSF a transféré les activités à une autre organisation pour permettre à ses équipes de se concentrer sur les soins de traumatologie. Dans la ville de Kandahar, MSF a mis en place une clinique temporaire fournissant des soins médicaux aux enfants de moins de cinq ans dans le camp de Haji, un campement informel où vivent actuellement 500 personnes déplacées. Nous avons également réhabilité des points d’eau et assuré l’accès aux toilettes et aux douches. En date de la semaine dernière, depuis le 28 juillet, plus de 170 enfants avaient été traités, la majorité pour des maladies respiratoires, des diarrhées et de l’anémie.

Le conflit reste très actif, alors que des flambées de violence continuent de surgir dans différentes régions du pays, et MSF adapte autant que possible ses projets pour répondre à l’évolution des besoins. Dans l’ensemble de l’Afghanistan, le personnel médical est confronté aux combats qui se déroulent dans les rues autour des installations médicales; ils ont peu de repos ou de répit et sont constamment inquiets pour leur famille. Alors que les combats arrivent dans les villes, les hôpitaux continuent de fonctionner, mais la menace de se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment est toujours présente, comme nous l’avons vu hier à Lashkar Gah. Toutes les installations médicales en activité doivent être respectées.