MSF activities with a set-up adapted to Covid19. Triage / Consultation (close physical examination) of patients with symptoms similar to covid19. New waiting area for patients with symptoms similar to COVID-19 © Peter Casaer/MSF
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COVID-19 : Cinq choses que nous pouvons faire pour protéger les personnes en déplacement

La pandémie de COVID-19 a un impact disproportionné sur les plus vulnérables du monde. Parmi eux, on compte plus de 70 millions de personnes déplacées de force à travers le monde – réfugiés, demandeurs d’asile, personnes déplacées à l’intérieur du pays, ainsi que les travailleurs migrants, y compris les sans-papiers.

 

Beaucoup de ces hommes, femmes et enfants vivent dans des camps formels et informels, des centres d’accueil ou des centres de détention. D’autres vivent dans la rue ou dans des abris informels. La plupart n’ont pas accès aux services de base tels que l’eau potable, les installations sanitaires ou les soins de santé, et beaucoup n’ont pas de statut juridique.

 

La pandémie de COVID-19 exacerbe et est exacerbée par ces conditions de vie.

 

Dans de tels contextes, les mesures préventives sont souvent impossibles. Comment demander aux gens de se protéger lorsqu’ils n’ont pas facilement accès à de l’eau et à du savon? Comment peuvent-ils s’isoler quand ils vivent entassés dans des petites tentes avec 10 autres personnes? La distanciation physique est très difficile, voire impossible, dans les camps surpeuplés et les milieux urbains denses, où les gens vivent dans des abris exigus avec de nombreux membres de leur famille. Devoir faire la queue aux points d’eau et pour obtenir de la nourriture augmente les risques de contamination.

« Dans le camp [de réfugiés], nous vivons cinq ou six dans un conteneur. Je sais que je ne peux pas empêcher les gens de venir voir mon compagnon de chambre et je n’ai pas d’autre choix que de faire signe aux gens de s’éloigner de moi. » – Frederik *, réfugié en Grèce

« Comment pouvez-vous demander aux gens de rester à la maison pour éviter l’infection? Où est leur maison? Nous parlons de près d’un million de personnes déplacées en Syrie – au moins un tiers de la population totale d’Idlib – la plupart vivant dans des tentes à l’intérieur de camps. Ils n’ont plus de maison. » – Cristian Reynders, coordonnateur de terrain MSF dans le nord-ouest de la Syrie

Dans de nombreux contextes, les personnes déplacées vivent dans l’insécurité, risquent d’être arrêtées ou de subir des abus, et peuvent être stigmatisées en tant que « porteuses de maladies » dans un contexte de xénophobie accrue, d’accès limité à des informations fiables et de dépendance parfois totale à l’aide humanitaire. Et dans bien des régions, cette aide est limitée.

De plus, dans de nombreux endroits, la pandémie est utilisée comme excuse pour punir les personnes en déplacement et celles qui tentent de les aider. Au moins 167 États ont entièrement ou partiellement fermé leurs frontières pour contenir la propagation de la COVID-19; parmi eux, 57 ne font pas d’exception pour les demandeurs d’asile (HCR). Les personnes en quête de sécurité et d’un abri sont refoulées aux frontières terrestres et maritimes; elles sont souvent renvoyées ou transférées dans des pays où leur vie et leur liberté sont gravement menacées. Parallèlement à la fermeture des frontières pour limiter la propagation de l’épidémie, de nombreux États refusent aussi volontairement l’entrée aux demandeurs d’asile ou empêchent indirectement leur accès.

« Il faisait extrêmement chaud, il n’y avait pas de nourriture ni d’eau … […] Les gens ont bu de l’eau salée de la mer et ils sont morts. Nous avions droit à une poignée de dal et à un bouchon d’eau par jour. […] Les hommes étaient battus et sont devenus extrêmement mal nourris, il ne leur restait que la peau et les os. Nous devions nous asseoir avec nos genoux à la poitrine tout le temps. Beaucoup de gens ont commencé à avoir les jambes enflées, sont devenus paralysés ou sont morts. » – Une jeune fille de quatorze ans, coincée sur un bateau pendant deux mois avec 389 autres personnes, après que la Malaisie a refusé de les secourir en raison des inquiétudes liées à la COVID-19

Alors, que pouvons-nous faire pour protéger ces populations particulièrement vulnérables?

1. Nous devons nous assurer que la COVID-19 n’est pas utilisée comme excuse pour appliquer des politiques meurtrières de contrôle de la migration. Les gouvernements ne doivent pas utiliser la COVID-19 comme excuse pour appliquer de nouvelles politiques restrictives de contrôle de la migration et se soustraire aux obligations internationales à l’égard des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants. Nous comprenons les graves défis posés par la COVID-19, mais protéger le bien-être des gens dans votre propre pays et respecter vos obligations internationales envers les réfugiés, les demandeurs d’asile et les migrants ne sont pas des principes mutuellement exclusifs.

2. Nous devons veiller au respect des droits de l’homme. Les gouvernements ne doivent pas utiliser les mesures d’urgence de santé publique pour la COVID-19 afin de cibler les réfugiés, les demandeurs d’asile et les migrants. Toutes les restrictions des droits doivent être strictement nécessaires, fondées sur des preuves scientifiques et non appliquées de manière arbitraire ou discriminatoire. Elles doivent être limitées dans le temps, respectueuses de la dignité humaine, susceptibles de révision et proportionnées. Les gouvernements doivent également continuer d’autoriser les gens à suivre les procédures légales pour demander l’asile.

3. Les confinements et la mise en quarantaine de masse ne peuvent être copiés-collés ou appliqués de manière discriminatoire. Les mesures de quarantaine et de confinement devraient être appliquées équitablement à tous sans discrimination; les soins de santé, le soutien social et psychosocial et les besoins de base comme la nourriture, l’eau et d’autres produits essentiels devraient être fournis aux personnes en quarantaine; et la quarantaine de masse devrait être évitée autant que possible. Forcer les gens à vivre dans des camps surpeuplés et insalubres a toujours été irresponsable, mais l’est maintenant plus que jamais en raison de la menace de la COVID-19.

4. Les personnes déplacées vulnérables devraient être évacuées lorsque cela est possible. Dans la mesure du possible, MSF demande l’évacuation des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants vulnérables. En Grèce, sur les points chauds de l’île, MSF demande l’évacuation des personnes les plus vulnérables (les personnes de plus de 60 ans et celles souffrant de troubles respiratoires, de diabète ou d’autres complications de santé), ainsi que des efforts continus pour décongestionner les camps, notamment en relocalisant les mineurs non accompagnés et les enfants malades vers d’autres États membres de l’UE. En Libye, MSF appelle la communauté internationale et les gouvernements européens à mettre en place des couloirs d’évacuation humanitaire directs pour les réfugiés, les migrants et les demandeurs d’asile les plus vulnérables exposés aux risques les plus imminents de mort, y compris ceux piégés dans des centres de détention à travers le pays et dans d’autres lieux de captivité.

5. Nous devons protéger l’accès aux soins de santé pour tous. Les mesures de contrôle de la COVID-19 ne devraient pas se faire au détriment de l’accès aux soins de santé urgemment nécessaires. Cela signifie que la fermeture des frontières ne doit pas empêcher les fournitures médicales et humanitaires d’urgence, ainsi que le personnel médical et humanitaire, d’entrer dans les pays. De plus, les gouvernements doivent veiller à ce que les restrictions dans les camps, les centres de détention ou d’accueil n’empêchent pas les gens d’accéder aux soins de santé.