Around 500 migrants started a caravan on Saturday 4 September from the southern Mexican city of Tapachula towards the northern part of the country in order to protest about their precarious situation. Dozens of thousands of migrants from Central America and South America have been trapped in Tapachula for months, after being deported from the USA or crossing from Guatemala. An MSF team accompanied the migrants during the first part of the caravan to provide medical assistance to them. © MSF/Yesika Ocampo
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Expulsions massives et échec des politiques d’asile : des dizaines de milliers de migrants abandonnés et en danger dans les villes frontalières du Mexique

 

Des dizaines de milliers de migrants sont piégés dans des conditions extrêmement difficiles dans le nord et le sud du Mexique en raison de l’échec des politiques d’asile et des expulsions massives des États-Unis, a déclaré aujourd’hui l’organisation internationale d’aide médicale et humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF), qui dénonce les conditions de surpopulation et le manque d’accès aux services médicaux et sociaux pour les migrants au Mexique.

« Ces personnes se retrouvent avec peu d’options pour se loger, ou encore elles vivent dans la rue ou dans des refuges surpeuplés où les conditions sanitaires sont précaires et accroissent le risque d’infection à la COVID-19 », explique Christoph Jankhöfer, coordonnateur du projet de MSF pour les migrants au Mexique. « Nous sommes préoccupés par l’anxiété, la dépression et le désespoir de la population face à l’absence de réponse des autorités ».

 

Intervention d’urgence dans le sud

 

Cette semaine, MSF a dépêché une équipe d’urgence à Tapachula, dans le sud du Mexique, où environ 40 000 migrants vivent regroupés, sans accès à un logement, aux services de base ou aux opportunités d’emploi. Le 4 septembre, 500 de ces migrants ont rejoint une caravane vers le nord pour protester contre leurs conditions et leur abandon.

Une première équipe d’évaluation de MSF ayant accompagné la caravane pendant une partie du voyage a soigné des patients pour déshydratation, maux de tête, douleurs musculaires et blessures aux pieds. Un cas d’hypoglycémie a également été traité.

 

Environ 500 migrants ont démarré une caravane le 4 septembre 2021 depuis la ville de Tapachula, dans le sud du Mexique, vers le nord du pays afin de protester contre leur situation précaire.
Environ 500 migrants ont démarré une caravane le 4 septembre 2021 depuis la ville de Tapachula, dans le sud du Mexique, vers le nord du pays afin de protester contre leur situation précaire.MSF/Yesika Ocampo

 

Les migrants de Tapachula sont originaires du Honduras, du Guatemala, du Salvador, du Venezuela, d’Haïti et de Cuba. Ces personnes, dont beaucoup sont des femmes et des enfants, vivent dans l’incertitude depuis des mois. Nombre d’entre elles ont récemment traversé la frontière avec le Guatemala, tandis que d’autres ont été expulsées par les États-Unis vers la frontière nord du Mexique, puis transférées vers le sud du Mexique par les autorités mexicaines.

 

Une autre impasse dans le nord

Plus de 2 000 personnes vivent dans une situation similaire dans la ville de Reynosa, à quelque 200 mètres du pont international qui relie cette ville mexicaine à Hidalgo, au Texas. Les migrants qui s’y trouvent, dont la plupart viennent du Salvador, du Honduras et du Guatemala, sont exposés à la chaleur suffocante et à de graves dangers, en plus de ne pas avoir d’accès adéquat aux services de base.   

Sur la Plaza de la Republica de Reynosa, il n’y a que 18 toilettes publiques disponibles dans le camp, soit une pour environ 110 personnes.

Sur la Plaza de la Republica de Reynosa, il n’y a que 18 toilettes publiques disponibles dans le camp, soit une pour environ 110 personnes. Ceux qui veulent se doucher ou laver leurs vêtements doivent payer 10 pesos mexicains (la moitié d’un dollar) pour utiliser les douches et les lavabos pendant 10 minutes maximum. L’eau potable (qui est parfois rare), les vêtements, la nourriture, les matelas, les tentes, les médicaments et les consultations médicales sont fournis par les organisations de la société civile.

« Leurs seules options sont de rester au Mexique et d’essayer de survivre dans des conditions déplorables, ou de tenter à nouveau de traverser aux États-Unis », affirme Anayeli Flores, responsable des affaires humanitaires de MSF à Reynosa.

« Ni le gouvernement mexicain ni le gouvernement américain ne donnent un soutien adéquat, malgré le fait que c’est la politique américaine et la coopération du Mexique avec ces politiques qui maintiennent ces personnes dans des conditions de vulnérabilité, violant leur droit de demander l’asile ».

 

Affections associées à la précarité et aux troubles psychologiques

 

À Reynosa, MSF propose des soins de santé primaire et des consultations et du soutien en santé mentale par l’intermédiaire d’une équipe de travailleurs sociaux. Nous soutenons également l’approvisionnement en eau potable dans le camp. Entre mars et août de cette année, MSF a réalisé 902 consultations. Les équipes traitent principalement des affections respiratoires, digestives et dermatologiques, en grande partie attribuables à une forte surpopulation et aux obstacles à une bonne hygiène. Après avoir parcouru de longues distances à pied, les migrants présentent aussi des blessures aux pieds et des douleurs musculaires.

Les équipes MSF ont accompagné les migrants pendant la première partie de la caravane du 4 septembre 2021 pour leur apporter une assistance médicale.
Les équipes MSF ont accompagné les migrants pendant la première partie de la caravane du 4 septembre 2021 pour leur apporter une assistance médicale.Yesika Ocampo/MSF

La plupart des personnes à qui MSF vient en aide ont quitté leur pays d’origine à cause de la violence, et elles sont souvent victimes de violences le long de la route migratoire les menant vers le nord. En plus de ces traumatismes, les migrants sont confrontés à l’impact sur la santé mentale de leurs conditions de vie précaires, de leur statut migratoire et de leur séparation familiale. Cela peut entraîner des troubles émotionnels tels que l’anxiété, le stress et une peur excessive. Dans certains cas, ils développent des troubles psychologiques.

Des politiques qui criminalisent les migrants

 

La plupart des migrants à Reynosa, dont des femmes, des femmes enceintes, des enfants, des personnes âgées, des membres de la communauté LGBTQ, des autochtones et des non-hispanophones, ont été expulsés des États-Unis en vertu du titre 42, une politique américaine de santé publique qui constitue une violation flagrante du droit international. La politique se sert de la pandémie de COVID-19 comme prétexte pour bloquer les personnes cherchant la protection aux États-Unis et les expulser vers les villes frontalières du Mexique, et ce avec la bénédiction du gouvernement mexicain. De telles politiques ont mis les migrants en danger et engendré des épisodes de violence inquiétants.

 

Gemma Dominguez | Coordonnatrice Generale Au mexique

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« La situation des migrants au Mexique est insoutenable », se désole Gemma Domínguez, coordonnatrice générale de MSF au Mexique. « Les politiques qui criminalisent la migration, l’absence de réponse humanitaire adéquate et les violences et persécutions répétées contre les migrants sont inacceptables et mettent en danger la vie de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants ».

MSF appelle les autorités mexicaines et américaines à prendre des mesures immédiates pour remédier à la situation humanitaire préoccupante des populations migrantes dans tout le pays, en particulier dans les régions frontalières. Les gouvernements américain et mexicain doivent travailler ensemble pour promouvoir l’accès à la protection dans la région au lieu de coordonner l’interdiction.