Le 16 juin, MSF a commencé à fournir une aide médicale d'urgence à 87 des 104 survivants du naufrage au large des côtes grecques. Grèce, 2023. © MSF
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MSF : les politiques de l’UE mènent à la mort des personnes en quête de sécurité

À la suite du naufrage du 14 juin qui a fait jusqu’à 500 victimes, mortes ou disparues au large des côtes grecques, Médecins Sans Frontières (MSF) dénonce les politiques migratoires de l’Union européenne (UE). Elle appelle à rendre des comptes sur les vies perdues et à mettre en place un mécanisme de recherche et de sauvetage en mer expert, proactif et piloté par les États.  

« Le manque de volonté politique pour assurer la capacité de sauvetage a contribué à l’accident en mer le plus meurtrier enregistré en Méditerranée depuis 2015 », déclare Duccio Staderini, chef de mission de MSF pour la Grèce et les Balkans. Les équipes de MSF qui fournissent des soins médicaux et psychologiques aux personnes survivantes du naufrage dans le centre d’enregistrement de Malakasa en Grèce ont exprimé leur chagrin et leur indignation face à la perte de vies humaines.

« Les centaines de vies perdues en mer le 14 juin sont la conséquence directe des politiques migratoires dissuasives de l’UE qui obligent les gens à emprunter des itinéraires mortels. Plutôt que d’offrir un passage sûr aux personnes en mouvement, ces politiques tuent les gens. »

L’équipe de MSF à Malakasa a fourni une assistance médicale à 87 personnes survivantes souffrant de brûlures et de blessures dues à l’exposition à l’eau de mer et au soleil ou d’un choc hypoglycémique dû au manque de nourriture. Certaines éprouvaient aussi de la détresse psychologique et émotionnelle en raison de l’exposition à la menace d’une mort imminente, au fait de ne pas savoir si les parents et les amis à bord du navire sont vivants ou morts, et à leurs expériences en Libye.

« Les personnes survivantes ont raconté à nos équipes comment elles ont appelé à l’aide, attendu pendant des heures et vu leurs amis et amies se noyer », explique Elise Loyens, coordonnatrice médicale de MSF. « Elles nous ont également raconté les horreurs qu’elles ont vécues en Libye : torture, coups, détention dans le désert pendant des jours et des semaines sans eau ni nourriture. Un jeune Syrien a dit qu’il voulait mourir chaque jour qu’il passait en Libye ».

Selon des personnes survivantes qui ont parlé à l’équipe de MSF, environ 300 individus originaires du Pakistan se trouvaient à bord du navire ; seuls 12 d’entre eux auraient survécu. Il y avait aussi beaucoup de femmes et d’enfants sur le pont inférieur du bateau ; seuls huit enfants ont été retrouvés vivants.

Une personne survivante a décrit le voyage et le naufrage à l’équipe de MSF : « Je n’ai pas bu d’eau pendant deux jours, mais j’ai tellement pleuré que je n’ai pas ressenti la soif. Quand le bateau a chaviré, je me suis accrochée à une rambarde métallique pour rester en vie. Je voyais les gens jetés, écrasés contre des pièces du bateau et précipités dans la mer. Jour et nuit, j’entends encore les cris et les pleurs des gens et le bruit de leur gorge bouillonnant d’eau de mer et suffoquant pendant qu’ils se noyaient ».

Ceux et celles qui ont survécu au naufrage commencent maintenant un parcours de rétablissement en essayant de composer avec la tragédie et de surmonter leur traumatisme psychologique. En même temps, ces gens reçoivent et doivent répondre aux messages de familles en détresse qui tentent de savoir ce qu’il est advenu de leurs proches.

Bien que le naufrage du 14 juin ait été le plus meurtrier en Méditerranée ces dernières années, les équipes de MSF en Grèce sont régulièrement appelées à fournir une assistance médicale d’urgence aux personnes qui ont survécu à des traversées maritimes dangereuses.

MSF réitère son appel à l’UE et à ses États membres, y compris la Grèce, à :

  • Garantir une enquête transparente et indépendante et utiliser tous les mécanismes de gouvernance pour analyser ce naufrage et les naufrages similaires qui ont eu lieu autour des côtes européennes.
  • S’engager à changer radicalement de politique en donnant la priorité à la sauvegarde des vies humaines. Ce nouveau naufrage doit conduire à une réflexion sur la manière dont l’UE a traité la question des migrations au cours des dernières années. Depuis trop longtemps, l’UE et ses États membres mettent en œuvre des politiques qui entraînent souffrances et morts, au lieu d’assurer le sauvetage et la protection.