An MSF staff (health promoter), Shehu Alkali, accompanying Patience Lawan with her child (Ruth Daniel) after being discharged from the under-six ward of the Nilefa Kiji nutrition centre. Five-month old Ruth Daniel, who spent 15 days on admission, was treated for severe acute malnutrition and watery diarrhoea.
PARTAGEZ

Nigéria : MSF lance une alerte sur le nombre sans précédent d’enfants malnutris traités à Maiduguri

 

À Maiduguri, la capitale de l’État de Borno, au Nigéria, les équipes du centre de nutrition thérapeutique de Médecins Sans Frontières (MSF) constatent un nombre sans précédent d’enfants souffrant de malnutrition et nécessitant un traitement essentiel. MSF met en garde contre une catastrophe imminente si des mesures immédiates ne sont pas prises.

Depuis le début de l’année 2023, les équipes de MSF constatent que dans l’État de Borno, au nord-est du Nigéria, le nombre d’admissions est actuellement le plus élevé jamais enregistré dans les semaines précédant la période de soudure annuelle. Cette période correspond au moment où les stocks de nourriture de la récolte précédente s’épuisent et où les niveaux de malnutrition atteignent leur maximum.

« L’augmentation massive du nombre d’enfants malnutris exige que les activités de prévention et de traitement de la malnutrition soient immédiatement renforcées afin d’éviter une situation catastrophique lorsque la période de soudure arrivera », explique Htet Aung Kyi, coordonnateur médical de MSF au Nigéria.

L’équipe du centre d’alimentation thérapeutique Nilefa Kiji que gère MSF à Maiduguri a constaté une augmentation du nombre d’enfants admis pour malnutrition aiguë modérée et sévère. En janvier de cette année, environ 75 enfants y ont été admis chaque semaine pour malnutrition sévère, soit trois fois plus que la moyenne des cinq dernières années pour la même période. Au début d’avril, le chiffre est passé à près de 150 par semaine, soit deux fois plus qu’il y a un an.

« C’est du jamais vu depuis que nous avons commencé à mener des activités de lutte contre la malnutrition en 2017 », témoigne Htet Aung Kyi. « Le nombre d’admissions hebdomadaires pour malnutrition sévère et modérée est deux à trois fois plus élevé que la moyenne enregistrée au cours des cinq dernières années. Et la tendance est à la hausse. L’année dernière a été terrible, mais cette année pourrait être pire si cette tendance se poursuit. »

Une action immédiate s’impose

La malnutrition n’est pas un phénomène nouveau à Maiduguri, où des années de conflit et d’insécurité ont conduit à une situation humanitaire critique. De nombreuses personnes ont été déplacées et vivent désormais dans des conditions précaires dans des sites informels, au sein de communautés d’accueil ou en transit dans des camps de détention.

Le nombre de personnes traitées par MSF pour malnutrition sévère a explosé en 2022, avec plus de 8 000 enfants hospitalisés pour des soins nutritionnels intensifs. À cette époque, un enfant sur sept provenait du camp de détention de Hajj. Ce camp mis sur pied par les autorités était destiné aux anciens membres des groupes d’opposition armés, à leurs familles et à ceux et celles qui vivaient sous leur contrôle. Nombre de ces individus sont arrivés dans ce camp de transit dans un état de santé précaire qui s’est aggravé en raison des conditions de vie difficiles qui y règnent.

La fin de l’année 2021 a marqué la fermeture des camps officiels de personnes déplacées et la réduction de l’aide humanitaire et alimentaire. Pour la plupart des gens, les conditions de vie sont extrêmement difficiles. Certaines personnes sont soumises à des restrictions de mouvement, ce qui les empêche de gagner leur vie ou de cultiver leurs terres. La situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent les communautés s’est accrue, notamment en raison de la pénurie des liquidités qui a suivi le changement de monnaie nigériane, à la fin de 2022, et de la destruction récente de certains marchés à Maiduguri.

Les équipes de MSF offrent des traitements hospitaliers et ambulatoires aux enfants souffrant de malnutrition. Elles fournissent également une alimentation ciblée aux nombreux enfants qui sont touchés par la malnutrition modérée, afin d’éviter que leur état ne se détériore. Les équipes mobiles de MSF gèrent également des cliniques offrant des soins de santé de base aux personnes vivant dans le camp de Hajj et dans les sites informels de Muna et Maisandari.

« L’aide alimentaire seule ne suffira pas »

Les autorités et les organisations humanitaires doivent immédiatement intensifier les activités liées à la malnutrition et augmenter le nombre de lits dans les centres de nutrition thérapeutique intensive. Elles doivent également améliorer les conditions de vie dans les camps de transit et élargir l’accès aux soins de santé. Ces mesures doivent s’accompagner d’une augmentation rapide du financement par dons et d’une bonne gestion de ces fonds. Il faut s’assurer que les denrées alimentaires parviennent à ceux et celles qui en ont le plus besoin. À ce stade, seuls 16 % des fonds demandés par le groupe de nutrition ont été obtenus. Cette situation est également alarmante.

Entre le début de janvier et le 20 avril 2023, 1 283 enfants malnutris ont été admis pour des soins hospitaliers intensifs au centre d’alimentation de MSF, à Maiduguri. C’est environ 120 % de plus qu’au cours de la même période l’année dernière.

Outre cette urgence nutritionnelle à Maiduguri, les équipes de MSF répondent à des crises sanitaires et de malnutrition de grande ampleur. Dans le nord-ouest du Nigéria, les équipes travaillent dans 32 centres d’alimentation thérapeutique ambulatoires et 10 centres d’alimentation thérapeutique hospitaliers dans les États de Kano, Katsina, Kebbi, Sokoto et Zamfara. L’année dernière, MSF a traité 147 860 enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère dans le nord-ouest du Nigéria.