MSF team walks through the rubble to talk to neighbours to monitor the health needs of the inhabitants of Comunidad El Granjero 2, Nueva Esperanza, Florida y Arca de Noé. © MSF/Alejandra Sandoval
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« Nous avons tout perdu » : Le Salvador frappé par la tempête tropicale Amanda et la COVID-19

Le 31 mai, la tempête tropicale Amanda a frappé le Salvador alors que le pays tentait d’endiguer la pandémie de COVID-19. Les inondations, les vents violents et les fortes pluies ont endommagé environ 30 000 maisons au Salvador et tué 27 personnes, tandis que dix autres manquent toujours à l’appel. Les équipes MSF ont lancé des activités d’urgence dans certaines des communautés les plus touchées de la capitale, San Salvador, et construit 25 refuges à San Salvador et Soyapango.

 

La tempête a été dévastatrice pour de nombreuses familles à travers le Salvador, en particulier celles qui vivent dans les quartiers de Granjero II, Nueva Esperanza, Florida et Arca de Noé à San Salvador. En quelques minutes, la rivière est sortie de son lit avec une telle force qu’elle a emporté de nombreuses maisons et bâtiments. Certaines personnes ont perdu tout ce qu’elles possédaient.

« À l’aube, l’eau était déjà à nos genoux. Nous avons pris ce que nous pouvions, mais nous avons presque tout perdu », a déclaré un habitant d’El Granjero II à l’équipe MSF lors de sa visite dans la communauté. Une voisine se tenait sur la pointe des pieds alors qu’elle désignait une tache sombre sur le mur d’environ deux mètres de haut : « c’est là que la rivière était la nuit dernière, au-dessus du cadre de la porte », a-t-elle déclaré.

Les rues et ruelles de Granjero II et Nueva Esperanza témoignent de la catastrophe : des lits, des appareils électroménagers, des objets personnels et des véhicules couverts de boue et mélangés à des ordures flottent librement, emportés par la rivière Acelhuate, fortement polluée par les eaux usées et les déchets industriels. Dans d’autres communautés en banlieue de San Salvador et de Soyapango, des glissements de terrain ont complètement détruit plusieurs bâtiments.

« Ces communautés étaient déjà confrontées à l’incertitude et au manque d’accès aux soins de santé en raison de la pandémie de COVID-19, et cela ne fait qu’aggraver la situation », explique Luis Romero Pineda, coordonnateur de terrain MSF au Salvador. « Les gens risquent de souffrir de divers problèmes de santé mentale et physique à la suite de la destruction de leurs biens et de la perte d’êtres chers.

La violence généralisée au Salvador a également affaibli la prestation de services de santé et renforcé la stigmatisation autour de la COVID-19 (car les gangs contrôlent de grandes parties des quartiers des villes). Cette tempête au milieu de la pandémie de COVID-19 est la dernière goutte pour bon nombre de ces familles. »

 

 

María Turcios et ses cinq enfants ont dû nager pour sauver leur vie le dimanche 31 mai 2020. L’eau a atteint le toit de la maison et brisé les charnières de la porte. Ses affaires sont éparpillées dans la rue et toute sa nourriture est perdue.Victor Peña/El Faro

 

Pendant la journée, des personnes de tous âges à El Granjero II tentent de récupérer ce qui reste de leurs biens. La nuit, certains s’installent dans des abris de fortune mais d’autres dorment sur le sol humide de leurs maisons endommagées, par peur de se faire voler ou de contracter la COVID-19 s’ils vont ailleurs.

Dans les refuges mis en place par les communautés ou autorisés par le gouvernement, la distanciation physique et le respect des mesures de prévention des infections sont quasiment impossibles. Il y a peu ou pas de fenêtres, l’approvisionnement en eau est irrégulier, car les tuyaux ont été endommagés, et il n’y a pas suffisamment de toilettes.

Les équipes MSF ont visité certaines de ces communautés et certains refuges, et fournissent des soins médicaux et psychologiques primaires par le biais d’une clinique mobile. MSF a également fait don de kits d’hygiène à certains des refuges où les besoins étaient les plus grands, et bientôt une équipe de promotion de la santé fera de l’éducation sanitaire et mènera des activités de prévention des maladies.

 

État de santé physique et mentale

Les sentiments d’anxiété et de tristesse sont monnaie courante. Avant de perdre leurs biens dans la tempête, les gens faisaient déjà face aux conséquences économiques et sociales du respect de la quarantaine imposée par le gouvernement salvadorien afin de freiner la propagation de la COVID-19. L’absence de revenu fixe et le manque de nourriture sont des préoccupations énormes pour de nombreuses personnes.

Ana Paula Abreu, responsable de la santé mentale pour MSF, explique que « les catastrophes naturelles peuvent causer de graves traumatismes chez les personnes qui en sont victimes. En un instant, ils voient tout leur espace personnel – qui fait partie de leur identité – détruit. Fournir un soutien psychosocial en ce moment est crucial, car il aide à prévenir les problèmes de santé mentale. »

Les gens ont peur de contracter la COVID-19 lorsqu’ils dorment dans des refuges et se regroupent pour obtenir des livraisons de nourriture. « Quand les inondations sont arrivées, nous étions couverts d’ordures, d’eau sale et de boue », a expliqué une personne à MSF. « Nous avons enlevé nos chaussures et sommes restés dans la boue pour chercher nos affaires. Si nous ne tombons pas malades de la COVID-19, nous tomberons sûrement malades de la grippe, de la diarrhée, ou d’éruptions cutanées ».

Certaines personnes qui souffrent de maladies chroniques, comme le diabète et l’hypertension, ne peuvent pas accéder aux soins de santé dont elles ont besoin en raison de la suspension des services non-COVID-19 dans les centres de santé publique pendant la quarantaine.

Serge Jory, un médecin MSF travaillant avec la clinique mobile, explique « qu’il y a plusieurs risques dans une situation comme celle-ci. En raison de l’exposition à l’eau contaminée et du manque d’eau, il existe un risque d’épidémies de diarrhée, d’infections bactériennes, d’infections respiratoires, d’affections cutanées et de propagation de la COVID-19 en raison du surpeuplement. L’interruption des traitements et la perte des dossiers médicaux sont également un gros problème et signifient que les patients ne peuvent pas contrôler leurs maladies chroniques, ce qui peut entraîner une détérioration de leur état. »