MSF teams are conducting an assessment in the flood-hit area of Sukkur, Sindh. A view of a village which is currently underwater. © MSF
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Pakistan : « Ces inondations risquent d’affecter la population pendant des mois »

 

Les pluies de mousson qui touchent le Pakistan depuis quelques mois se sont intensifiées ces dernières semaines, provoquant des dégâts considérables dans une grande partie du pays. Des millions de personnes ont perdu leur maison et sont obligées de dormir dans des abris de fortune, tandis que de nombreuses structures de santé sont endommagées ou non fonctionnelles. Les équipes de MSF renforcent leur appui aux communautés et se préparent notamment à intervenir rapidement en cas d’épidémies.

Le point avec le Dr Khalid Elsheik Ahmedana, responsable adjoint des opérations au sein de la cellule des urgences de MSF France.

Que font actuellement les équipes MSF en réponse aux inondations?

 

À Bangalzai et à Hanna, dans le centre du Baloutchistan, les équipes d
À Bangalzai et à Hanna, dans le centre du Baloutchistan, les équipes d’intervention d’urgence de MSF ont distribué à 342 familles touchées par les inondations des articles de première nécessité, dont des kits d’hygiène.MSF

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MSF est présente de manière permanente au Pakistan, notamment dans les provinces du Baloutchistan, de Sind, du Penjab et du Khyber Pakhtunkhwa. Les équipes sont intervenues rapidement après la déclaration de l’état d’urgence, le 26 août, dans la mesure de leurs moyens. Bien que l’association emploie environ un millier de personnes dans le pays, c’est finalement peu lors d’une catastrophe naturelle de cette ampleur. Les premières estimations des organisations internationales indiquent que plusieurs millions de personnes auraient besoin d’une aide humanitaire. Ces chiffres sont évidemment à prendre avec précaution, puisqu’il est difficile d’avoir une image précise de ce qui se passe à travers le pays. Nos équipes présentes dans le pays constatent toutefois que les besoins sont immenses. Elles ont vu des villages entièrement submergés, où on n’aperçoit plus, parfois, que le sommet d’une maison. De nombreuses personnes ont tout perdu et sont obligées de dormir sous des tentes, au bord des routes.

La situation n’est pas la même dans toutes les régions, ni même dans toutes nos zones d’intervention, certaines villes ou certains villages ont été plus affectés que d’autres. Nos équipes parcourent différentes régions pour mener des évaluations, et offrir des soins aux gens. Cela se fait notamment à travers la mise en place de cliniques mobiles qui tentent d’apporter des soins de santé primaires au plus près des communautés. Les équipes logistiques sont également à pied d’œuvre pour fournir de l’eau potable. Elles distribuent aussi des biens de première nécessité, comme du savon, des produits d’hygiène ou des ustensiles de cuisine. Nous espérons pouvoir acheminer rapidement davantage de matériel et de ressources humaines pour développer notre intervention.

Quels sont les besoins des populations d’un point de vue médical?

 

Les équipes d
Les équipes d’urgence de MSF à Dera Murad Jamali ont mis en place des cliniques mobiles dans différents endroits des villages touchés par les inondations, notamment à Manjhu Shori, Rabi Pull et à la centrale électrique d’Uch. MSF

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Il est encore un peu tôt pour tirer des orientations précises. Néanmoins, nous savons que certaines maladies endémiques au Pakistan pourraient se propager à la faveur d’une dégradation des conditions de vie et d’hygiène. Le paludisme, qui n’est pas une maladie hydrique à proprement parler, pourrait se développer en raison de la stagnation des eaux. Les personnes les plus à risque sont les enfants, dont on sait qu’ils sont les premières victimes du paludisme. La dengue, transmise elle aussi, par une piqûre de moustique, fait également partie des maladies endémiques au Pakistan. Nous notons également des cas de diarrhées aqueuses sévères, conséquence des inondations où les nappes phréatiques et plus généralement les réserves d’eau ont pu être souillées. Dans de telles conditions, les agents pathogènes risquent de proliférer, et si les gens n’ont pas accès à une eau potable et saine et à des latrines fonctionnelles, les maladies hydriques pourraient se répandre. Les équipes de MSF acheminent du matériel et des médicaments en prévention du développement de telles maladies, comme des centres de traitement dédiés ou des antipaludéens.

Nous souhaitons également porter une attention particulière aux personnes atteintes de maladies non transmissibles, comme le diabète, qui pourrait souffrir d’une rupture dans la continuité de leurs soins. Tout dépendra du résultat des évaluations plus précises que mènent actuellement nos équipes. Dans l’immédiat, et puisque les gens que nous rencontrons sont majoritairement des personnes déplacées, qui vivent dans des abris de fortune, une de nos priorités est de pouvoir fournir un accès à l’eau potable, un abri convenable et de rétablir des conditions d’hygiène suffisante. Ce sont actuellement les besoins les plus urgents.

Quelles peuvent être les conséquences à plus long terme de ces inondations?

 

Les équipes des MSF procèdent à une évaluation dans la zone touchée par les inondations de Sukkur, dans le nord du Sindh.
Les équipes des MSF procèdent à une évaluation dans la zone touchée par les inondations de Sukkur, dans le nord du Sindh.MSF

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Quand une catastrophe naturelle survient, les conséquences varient en fonction de l’ampleur du désastre et du nombre de personnes touchées. Selon certaines estimations, les pluies de mousson au Pakistant auraient été multipliées par trois cette année, et près d’un tiers de ce pays de 220 millions d’habitants et d’habitantes aurait été submergé. C’est un événement d’une puissance considérable. Il faut aussi prendre en compte la destruction d’une partie du système de santé, car de nombreuses structures sont endommagées, et il va falloir du temps pour les reconstruire. Au stade actuel, on ne peut présager de rien, mais les équipes de MSF tentent de se préparer pour être prêtes à intervenir rapidement selon différents scénarios.

Ces inondations risquent d’affecter la population du pays pendant des mois. Une partie des champs, des récoltes et des stocks de nourriture a été détruite par les inondations. Certaines régions du Pakistan, ou certaines communautés du pays pourraient rencontrer des problèmes d’accès ou d’approvisionnement en nourriture dans les semaines ou les mois qui viennent. Cette situation place certaines personnes, comme les femmes enceintes et les enfants, dans une situation de plus grande vulnérabilité. Dans cette configuration, nous avons déjà commencé à acheminer des stocks d’aliments nutritionnels thérapeutiques que nous utilisons par ailleurs sur bon nombre de nos terrains d’intervention. On ne les utilisera peut-être pas, mais devant une situation d’une telle ampleur, il vaut mieux anticiper.