A woman rests with her granddaughter during an MSF support session for women in the Tenosique migrant shelter. © Marta Soszynska/MSF
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Politique « Rester au Mexique »: la dévastation se poursuit un an plus tard

Un an après que les États-Unis ont mis en œuvre leur politique « Rester au Mexique », des dizaines de milliers de demandeurs d’asile sont coincés et en danger au Mexique. Ils confrontés à des violences quotidiennes et vivent avec les conséquences sur leur santé mentale des incertitudes et des risques constants, a déclaré l’organisation internationale d’aide médicale et humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF) le 30 janvier.

 

« Les États-Unis continuent de renvoyer les demandeurs d’asile vers un danger certain et entre les mains des cartels qui contrôlent les routes migratoires au Mexique », a déploré Sergio Martin, coordonnateur général de MSF au Mexique. « À quelques pas de la frontière américaine à Matamoros, des milliers de demandeurs d’asile vivent désormais dans des camps de fortune avec un accès limité à un abri ou à des soins de santé de base. À Nuevo Laredo, nous avons des patients qui ne mettent pas les pieds à l’extérieur de leur abri parce qu’ils savent qu’ils peuvent être enlevés, détenus contre rançon ou tués. »

Mis en application en janvier 2019, la politique « Rester au Mexique » – officiellement appelée les « Protocoles de protection des migrants (PPM) » par le gouvernement américain – oblige les demandeurs d’asile à retourner au Mexique dans l’attente de leur procédure d’asile, les rendant vulnérables aux enlèvements et à la violence. Plus de 62 000 personnes ont été renvoyées au Mexique dans le cadre de la politique. MSF travaille le long de la route migratoire au Mexique et aux postes frontaliers de Nuevo Laredo, Matamoros, Mexicali et Reynosa, et est témoin des conséquences humanitaires dévastatrices de la politique et des nouvelles règles qui ont essentiellement mis fin à l’asile à la frontière sud des États-Unis.       

Une politique qui favorise un environnement précaire

 

Environ 80 pour cent des migrants traités par les équipes MSF à Nuevo Laredo au cours des neuf premiers mois de 2019 ont déclaré avoir subi au moins un incident violent. Un autre 43,7 pour cent des patients ont déclaré avoir été victimes de violences au cours des sept jours précédant la consultation.

En septembre 2019, 43 pour cent des patients de MSF qui ont été envoyés à Nuevo Laredo en vertu de la politique Rester au Mexique ont été subséquemment kidnappés. Douze pour cent des patients ont déclaré avoir été victimes d’une tentative d’enlèvement ratée. En octobre 2019, le pourcentage de patients MSF qui étaient à Nuevo Laredo en raison de la politique et qui avaient été kidnappés est passé à 75 pour cent. Ces chiffres ne représentent que les programmes MSF et ne reflètent pas toute l’ampleur de la violence à laquelle les migrants sont confrontés.

 

 

À Nuevo Laredo, les patients de MSF souffrent d’anxiété sévère, de dépression et de stress post-traumatique en raison du danger que représentent leur retour au Mexique et l’incertitude de leur avenir. « Nos patients vivent dans un état d’incertitude et de peur constante », a déclaré Sergio Martin. « Ils sont traumatisés et ont besoin d’un soutien en santé mentale. »

La politique Rester au Mexique s’inscrit dans une panoplie de nouvelles restrictions d’asile extrêmement préjudiciables promulguées par les États-Unis en collaboration avec les gouvernements de la région, et met la vie des gens en péril en les renvoyant délibérément vers le danger.

En 2019, les États-Unis ont négocié des accords de migration avec les gouvernements du Guatemala, du Honduras et de Salvador leur permettant d’envoyer des demandeurs d’asile dans ces pays.

« Beaucoup de nos patients échappent à des niveaux de violence élevés au Guatemala, au Honduras et au Salvador », a déclaré Marcelo Fernandez, coordonnateur régional des programmes MSF en Amérique centrale. « Il est absurde que les États-Unis renvoient des gens dans les mêmes pays d’Amérique centrale qu’ils fuient en premier lieu. »

En plus d’être dangereux, ces pays ne disposent pas de l’infrastructure, des mécanismes de protection ou du financement nécessaires pour commencer à recevoir des demandeurs d’asile. Selon MSF, les informations exactes sur ces conditions, leur mise en œuvre ou leur calendrier seront limitées.

« Les personnes que nous voyons le long des routes migratoires sont bien conscientes des dangers auxquels elles seront confrontées sur leur chemin, mais elles veulent désespérément échapper à la violence et à la pauvreté dans leur pays et continueront à chercher refuge aux États-Unis », a-t-il déclaré. « Un an après la mise en place de la politique Rester au Mexique, les conséquences et les risques qu’elle crée pour les personnes extrêmement vulnérables sont évidents. Les États-Unis doivent mettre fin à cette politique cruelle et inhumaine qui oblige les gens à risquer leur vie pour demander l’asile. »