View inside the town of Ndu, northern DRC, where thousands of people from the Central African Republic sought refuge due to a non-state armed group attack on Bangassou on January 3rd. According to some estimates, over 12,000 refugees arrived in Ndu in just a few days. © Dale Koninckx/MSF
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RCA : Une année de violence au cœur d’un ancien conflit

Fin 2020, un nouveau cycle de violence a déferlé sur la République centrafricaine (RCA), pays déjà marqué par des décennies de conflits. Retour en images sur le travail mené par les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) au cours de l’année écoulée pour soutenir l’accès aux soins dans des conditions souvent très difficiles.

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Actions nécessaires à l’occasion du premier anniversaire de la dose de vaccin COVID-19 Carte de dose reflétant certaines des interventions de MSF en République centrafricaine.

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Les violences poussent la population à fuir, dans et au-delà de la RCA
Les violences poussent la population à fuir, dans et au-delà de la RCADale Koninckx/MSF

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Des réfugiés centrafricains arrivent dans le village de Ndu, en République démocratique du Congo (RDC), après avoir traversé la rivière Mbomou. Dans le sillage des élections de décembre 2020, une nouvelle alliance de groupes armés appelée Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) lance une offensive contre le gouvernement de la RCA.

Bangassou a été l’une des villes affectées par les violences armées. Le 3 janvier, des centaines d’habitants se sont réfugiés dans l’hôpital soutenu par MSF et plus de 10.000 personnes ont fui vers Ndu, en RDC. MSF a soutenu les populations de Bangassou et de Ndu en leur fournissant des abris, de la nourriture, de l’eau et des soins médicaux.

La ville de Bouar est aussi devenue une ligne de front entre la CPC et les Forces armées centrafricaines (FACA) et de la Mission de maintien de la paix de l’ONU (MINUSCA). Plus de 8.000 personnes ont dû fuir leur domicile. Près de la moitié sont restées dans l’ancienne cathédrale de la ville. « C’est le dénuement total », témoigne alors Tristan Le Lonquer, chef de mission MSF, qui y déploie une intervention d’urgence de janvier à mars « Les conditions de vie dans les sites de déplacés sont déplorables, notamment en raison du manque d’eau potable. “

Le parcours d
The journey of a wounded patient.Adrienne Surprenant/Collectif Item for MSF

Dans les premières semaines de la reprise du conflit, les combats ont été particulièrement intenses. En un mois seulement, les équipes de MSF ont soigné 258 personnes blessées par les violences dans le pays. France Beldo, 31 ans, a été touchée par une balle perdue le 13 janvier alors qu’elle était sur la terrasse de sa maison à Bangui. La CPC était alors aux portes de la capitale. Elle a été emmenée à l’hôpital SICA, un centre de traumatologie chirurgicale géré par MSF. La balle a traversé sa main, sa poitrine et son épaule mais n’a pas endommagé d’organes vitaux.

Le 22 janvier, France sort de l’hôpital, un jour après que le gouvernement ait décrété un état d’urgence de deux semaines dans le pays. “Je me demandais si j’allais survivre”, explique France. “Ce n’est que lorsque je suis arrivée ici que les médecins m’ont dit : ‘Tout va bien se passer’. Leur travail m’a permis de guérir, mais tout le monde est très inquiet. Je souhaite que les combats s’arrêtent pour que le pays soit tranquille.”

Tous les blessés n’ont pas eu la même chance que France. Fin décembre 2020, un de nos collègues a perdu la vie alors qu’il était en congé et se rendait de Bambari à Bangui à bord d’un camion de transport public. Des coups de feu ont soudainement éclaté. Il a été transféré à Grimari pour y être soigné, mais il a succombé à ses blessures peu de temps après son admission.

Les violences sexuelles, un problème de santé publique exacerbé par le conflit
Sexual violence, a public health issue exacerbated by the conflict.Adrienne Surprenant / Collectif ITEM/

Après la mort de sa mère et avoir été rejetée par son père, Charlotte est allée vivre avec sa tante et son oncle. Un jour, alors que la maison était vide, son oncle l’a violée. Sa tante a refusé de la croire et Charlotte s’est retrouvée seule, désespérée. Elle a signalé le viol à la police, mais aucune mesure n’a été prise. Charlotte s’est alors rendue au centre MSF de Tongolo, où près de 9.000 victimes de violences sexuelles ont reçu des soins médicaux, psychologiques et psychosociaux depuis 2017.

Les violences sexuelles sont devenues un problème de santé publique en RCA, exacerbé pendant les périodes de conflit. Le personnel MSF du centre Tongolo rapporte que les agresseurs sont souvent connus de leurs victimes : amis, voisins, membres de la famille. Mais avec la reprise du conflit au début de l’année 2021, les victimes de violences sexuelles des zones touchées par la violence ont indiqué que les hommes armés étaient les principaux responsables de ces actes.

Des besoins urgents dans tout le pays
Emergency needs across the countrySeigneur Yves Wilikoesse

« Je suis malade depuis que nous avons fui dans la brousse », déclarait en avril Thérèse, qui a dû fuir sa maison et trouver refuge à Grimari. « J’ai tout le temps froid, et j’ai mal partout. Je vomis constamment et j’ai la diarrhée. » Pendant des semaines, elle n’a pas pu consulter de médecin et s’est soignée avec des médicaments traditionnels et des plantes.

La reprise du conflit a eu un impact considérable sur l’accès aux soins. MSF a déployé des équipes d’urgence dans tout le pays pour aider les personnes affectées par les violences. Nos équipes ont mis en place des cliniques mobiles pour se rendre dans les centres de santé, les écoles et les camps de déplacés. À Grimari, Bossembélé et Ippy, elles ont assuré plus de 5.000 consultations médicales entre décembre 2020 et avril 2021, en mettant l’accent sur les soins les plus urgents, les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes. La plupart des patients ont été traités contre le paludisme, l’une des principales causes de mortalité en RCA.

Volatilité dans les zones rurales
Volatility in rural areasIgor Barbero/MSF

Après avoir vu la coalition rebelle progresser dans le pays, les troupes gouvernementales appuyées par des forces alliées ont progressivement repris le contrôle des principales villes de la RCA, repoussant les groupes armés dans la brousse. La situation est devenue très volatile dans de nombreuses zones rurales, marquées par de nombreux combats et des attaques de part et d’autre contre les populations locales.

In late May, Tanguina Chela fled her village of Gmganga, close to Kabo town, along with her husband and three children. Most of Gmganga’s 200 inhabitants left following fears of potential retaliation against local communities accused of collaborating with government forces.

Fin mai, Tanguina Chela a fui son village de Gmganga, près de la ville de Kabo, avec son mari et ses trois enfants. C’était la troisième fois qu’elle était forcée de fuir sa maison. La plupart des habitants de Gmganga sont également partis par crainte de représailles et d’être accusés de collaborer avec les forces gouvernementales.

« J’ai tout laissé là-bas », expliquait-elle en juin à Kabo. « J’ai souffert toute ma vie. Depuis que j’ai sept ans, la même histoire se répète : je dois fuir à cause de la guerre. J’ai perdu mes biens, mes terres, tout… J’ai des enfants, et je ne sais pas comment je vais les nourrir. » Tanguina fait partie des 1,4 million de Centrafricains actuellement déplacés ou réfugiés, soit près d’un tiers de la population du pays.

Des attaques répétées contre les soins médicaux
Repeated attacked on medical careIgor Barbero/MSF

Le conflit a gravement affecté la fourniture de soins médicaux. Au cours du premier semestre 2021, les équipes MSF ont découvert des dizaines de structures de santé qui avaient été saccagées, endommagées et occupées par des hommes armés. Lors d’incursions armées dans des hôpitaux, des patients ont été victimes de violences, d’abus physiques, d’interrogatoires et d’arrestations. Les agents de santé communautaires travaillant dans des zones rurales ont été menacés et agressés. Des chauffeurs à moto qui livraient des médicaments vitaux ou transportaient des patients ont été attaqués et volés sous la menace d’une arme. Certains d’entre eux ont été blessés, et même tués.

Suite à des incidents, MSF a plusieurs fois dû suspendre temporairement des activités médicales, y compris la fourniture de soins vitaux, la supervision de centres de santé, l’approvisionnement en médicaments ou le transport des patients. « Être contraints de suspendre certaines de nos activités ne fait qu’aggraver la vulnérabilité des gens. Cela entraîne des décès pourtant évitables chez des enfants en bas âge ou chez des femmes qui souffrent de complications à la grossesse ou à l’accouchement, par exemple » expliquait en juillet Gisa Kohler, responsable adjointe des programmes de MSF.

Les camps de déplacés ne sont pas épargnés par la violence
Camps for displaced people not spared from violenceLys Arango

La zone de Bambari a régulièrement été en proie aux violences. Suite à des affrontements survenus début juin, près de 8.500 résidents du camp de déplacés d’Elevage, à la périphérie de la ville, ont été poussés à la fuite. Le camp a été réduit en cendres et un centre anti-paludisme géré par MSF dans le camp a été détruit. La plupart des résidents ont trouvé d’abord refuge dans l’enceinte d’une mosquée de la ville de Bambari où ils ont été contraints de rester dans des conditions difficiles.

Les années de conflit ont durement affecté la famille de Youmousa. Ses membres ont dû prendre la fuite à plusieurs reprises. La destruction du camp d’Elevage fut l’événement de trop pour la mère de Youmousa. « Elle n’était plus en mesure de faire face à cela », témoignait Youmousa en août. ” Après qu’on ait été chassés d’Elevage, elle a refusé de manger. Elle ne dormait plus et parlait à peine. Elle est morte et nous l’avons enterrée au cimetière de Bambari, très loin de sa ville natale . »

Retour dans un centre de santé délabré
Returning to a health centre in shamblesMSF

Lorsque l’équipe MSF est entrée dans le village de Nzacko en juillet, elle a trouvé une succession de bâtiments en ruine envahis par la végétation, des voitures brûlées, des marchés et magasins abandonnés. Depuis janvier, la plupart des habitants avaient fui le village, vivant aux alentours dans des conditions très précaires, sans pouvoir accéder à l’aide humanitaire à cause de l’insécurité. Lorsque les combats ont cessé, la population est progressivement revenue.

« Quand nous sommes arrivés, nous avons trouvé le centre de santé délabré. Le paludisme et la malnutrition avaient fait des ravages parmi la population qui s’était réfugiée dans la forêt. » Pelé Kotho-Gawe, infirmier MSF.

Octavia Braza, 33 ans, était sur le point de donner naissance à son septième enfant. Elle n’avait pas mangé de la journée : il ne lui restait plus rien après avoir nourri ses enfants. Ces derniers mois, la mortalité maternelle avait augmenté dans la zone. Heureusement pour Octavia, l’arrivée de l’équipe MSF l’a aidée à éviter les complications et à accoucher en toute sécurité. Après cinq heures de travail, son bébé est né, sain et sauf.