Les équipes de promotion de la santé de MSF sensibilisent les gens sur les mesures d’hygiène pour réduire les risques de contracter le choléra dans le camp de personnes déplacées de Kashaka. République démocratique du Congo, 2025. © Daniel Buuma
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République démocratique du Congo : l’épidémie de choléra se propage rapidement à travers le pays

Une réponse humanitaire internationale rapide et coordonnée est nécessaire pour contenir la propagation de la maladie.

La République démocratique du Congo est touchée par l’une des pires épidémies de choléra de ces dix dernières années. Cependant, le système de santé reste incapable de faire face à une épidémie de cette ampleur et de la freiner, alerte Médecins Sans Frontières (MSF). 

En seulement neuf mois, plus de 58 000 cas suspects ont été enregistrés, selon le ministère de la Santé. Face à cette progression rapide, une mobilisation immédiate et renforcée des autorités nationales, des organisations humanitaires et des partenaires internationaux est nécessaire pour contenir la propagation de la maladie. 

Des 26 provinces du pays, 20 sont désormais touchées. Du mois de janvier à la mi-octobre, plus de 1 700 décès ont été enregistrés, avec un taux de mortalité supérieur à 3,0 %. La situation ne cesse de s’aggraver, l’épidémie gagnant de nouvelles zones de santé, y compris des provinces jusque-là non endémiques au choléra. Les inondations, les conflits, les déplacements, et l’insuffisance des systèmes d’assainissement et d’approvisionnement en eau ont contribué à déclencher des épidémies de grande ampleur comme celle-ci. À l’approche de la saison des pluies, la situation risque de se détériorer, augmentant les risques de transmission de la maladie et de contamination.

« En collaboration avec le personnel local du ministère de la Santé, nous essayons de contenir la maladie. Mais l’ampleur de la crise nécessite une mobilisation urgente de tous les partenaires, même dans les zones isolées. »

– Ton Berg, responsable des programmes de MSF au Sud-Kivu

« La propagation rapide de l’épidémie à travers le pays cette année nous préoccupe particulièrement, surtout lors de la saison des pluies. Nous redoutons de nouvelles flambées si des mesures urgentes ne sont pas prises », alerte Jean-Gilbert Ndong, médecin et coordonnateur médical de MSF en RDC. 

Depuis janvier 2025, MSF a renforcé sa réponse à l’épidémie dans plusieurs provinces du pays, dont l’Équateur, le Haut-Katanga, le Mai-Ndombe, le Maniema, le Nord et le Sud-Kivu, le Sankuru, le Tshopo, le Tanganyika et la ville de Kinshasa. Actuellement, nos équipes demeurent mobilisées dans les zones les plus touchées comme le territoire de Fizi, au Sud-Kivu, et le site de Konga Konga, dans le Tshopo. Depuis janvier, elles ont déjà mené 16 interventions d’urgence en soutien au ministère de la Santé, qui ont permis de soigner plus de 35 800 personnes et d’en vacciner plus de 22 000 contre la maladie. 

« À ce stade critique, seule une mobilisation générale permettra de contenir la maladie sur le terrain et de freiner l’expansion alarmante des foyers épidémiques », insiste Jean-Gilbert Ndong. 

Des personnes reçoivent des soins au centre de traitement du choléra de MSF à Baraka, dans le territoire de Fizi, au Sud-Kivu. République démocratique du Congo, 2025. © Abdon Manengu Mbangala/MSF

En RDC, les efforts de lutte contre la maladie  suffisent à peine

La réponse sur place se heurte à des obstacles majeurs. Les fonds alloués par le gouvernement congolais sont insuffisants, la présence des organisations humanitaires est limitée et le mécanisme d’intervention est mal coordonné. De plus, la faiblesse des systèmes de surveillance et d’identification de cas suspects, le manque de personnel médical et de fournitures, ainsi que la distribution limitée de vaccins compromettent davantage la mise en œuvre d’une réponse rapide, efficace et durable. 

« Partout où nos équipes interviennent, le constat est alarmant : les structures existantes ne sont pas adaptées pour faire face au choléra, et les fournitures médicales et les vaccins manquent », explique Ton Berg, responsable des programmes de MSF au Sud-Kivu. « En collaboration avec le personnel local du ministère de la Santé, nous essayons de contenir la maladie. Mais l’ampleur de la crise nécessite une mobilisation urgente de tous les partenaires, même dans les zones isolées. Le gouvernement congolais et les organisations humanitaires doivent renforcer les ressources financières et médicales, en particulier la distribution et l’acheminement des vaccins, ainsi que le mécanisme d’intervention d’urgence afin de soutenir la réponse contre le choléra. »

Ezekiel Balibuno, infirmier chez MSF, soigne un patient dans le centre de traitement temporaire mis en place pour offrir des soins aux gens touchés par l’épidémie de choléra à Lomera, dans le Sud-Kivu. République démocratique du Congo, 2025. © Sam Bradpiece/MSF

Le choléra est une infection bactérienne hautement contagieuse. Sans traitement adéquat, cette maladie traitable et évitable peut rapidement devenir mortelle. Sa propagation est favorisée par de mauvaises conditions d’hygiène, un accès insuffisant à l’eau potable et un manque d’installations sanitaires. Dans les zones densément peuplées, notamment dans les grandes villes telles que Kinshasa et dans les zones rurales où se concentrent de nombreuses personnes déplacées internes, cela représente un important défi. 

Les équipes de MSF ont dû redoubler leurs efforts pour combler les lacunes des mécanismes d’intervention d’urgence des autorités sanitaires et d’autres organisations. Afin de ralentir la propagation de la maladie, MSF soutient le ministère de la Santé dans la prise en charge médicale dans les centres de traitements spécialisés et par la formation du personnel de santé communautaire. Nous avons également mis en place des points de chloration et renforcé des systèmes d’eau et d’assainissement. 

« Nous appelons à une action coordonnée et urgente pour garantir la fourniture rapide de soins médicaux, notamment un accès sans entrave et un investissement durable dans l’accès à l’eau potable et à l’assainissement », poursuit Ton Berg. 

Un superviseur de MSF effectue sa tournée médicale, forme l’équipe et examine les personnes hospitalisées dans l’unité de traitement du choléra gérée par MSF au centre de santé de Mugunga, à Goma. République démocratique du Congo, 2025. © Laora Vigourt/MSF

Derrière chaque intervention, un accès aux soins limité

Alors que les équipes de MSF s’efforcent de répondre rapidement aux épidémies, elles ont difficilement accès aux personnes atteintes de choléra. Les obstacles sont nombreux : difficultés logistiques, risques sécuritaires, barrières administratives et d’approvisionnement. À titre d’exemple, la fermeture des aéroports de Bukavu et Goma depuis des mois freine les principales voies d’acheminement de fournitures, de médicaments et de matériel vers l’est du pays. 

Dans la zone de santé de Fizi, au Sud-Kivu, la présence d’organisations humanitaires reste limitée. Et pratiquement aucune ne s’est engagée spécifiquement dans la lutte contre la maladie. 

« L’insécurité persistante, marquée par les affrontements entre groupes armés le long des axes principaux, entrave les déplacements et retarde la livraison de l’aide, obligeant les équipes à effectuer de longs détours pour éviter les zones à risque », déplore Ton Berg. 

Pour les communautés, l’accès aux soins de santé représente également un défi majeur. Les distances à parcourir, le manque de moyens de transport et les conditions sécuritaires rendent difficile l’accès aux structures médicales. Une fois sur place, ces centres de santé sont souvent sous-équipés et incapables de répondre aux besoins essentiels, laissant les personnes les plus vulnérabilisées sans soins essentiels. 

En tant que menace majeure pour la santé publique en RDC, le choléra doit figurer en tête des priorités nationales. MSF appelle à une action coordonnée afin de garantir la fourniture rapide de soins médicaux. Il s’agit notamment d’assurer la disponibilité des vaccins, un accès sans entrave et des investissements durables pour l’accès à l’eau potable et à l’assainissement.