Aisha, promotrice de santé MSF, discute avec les membres de la communauté et les dirigeants du camp d'Um Sangour. Soudan, 2023. © MSF/Mazin Al-Hadi
PARTAGEZ

Soudan : « L’ampleur des besoins ici est écrasante »

Aisha
Promotrice de la santé MSF

Aisha, promotrice de la santé à MSF, travaille dans les trois camps de la région du Nil Blanc, au Soudan, pour soutenir les communautés de personnes déplacées à l’intérieur du pays ou réfugiées.

Je ne trouve pas les mots justes pour décrire les conditions dans lesquelles les gens vivent ici. J’ai vu des femmes accoucher et s’occuper de leurs nouveau-nés dans des tentes surpeuplées et surchauffées, sans accès à l’eau potable ni à des installations sanitaires adéquates.

Je suis déjà venue ici, en 2020, et même à l’époque, les camps pour personnes réfugiées du Nil blanc avaient du mal à répondre aux besoins fondamentaux de la communauté. Aujourd’hui, cinq mois après le début du conflit, avec près d’un demi-million de personnes déplacées à l’intérieur du pays ou réfugiées vivant dans les dix camps du Nil Blanc, la situation a atteint un point critique. Les gens ont perdu leur emploi et leurs moyens de subsistance, et ce qui est encore plus grave, c’est que nul ne sait quand cette situation prendra fin.

Mon travail de promotrice de la santé consiste à dispenser une éducation sanitaire, à identifier les besoins d’ordre social des personnes — et surtout à m’engager auprès de la communauté en écoutant les histoires des individus. J’aimerais en partager une avec vous.

Dans le camp d’Alagaya, le deuxième plus grand camp pour personnes réfugiées dans l’État du Nil Blanc, j’ai rencontré une mère de trois enfants qui avait fui le conflit qui se déroulait à Khartoum. Son plus jeune souffrait de malnutrition, et il était clair pour les médecins que nous devions l’envoyer dans un hôpital en dehors du camp pour qu’il reçoive un traitement adéquat. Cependant, les mères hésitent souvent à quitter leur famille et leur famille pour faire le voyage, ce qui a été le cas.

J’ai passé des heures à lui parler, à lui expliquer les avantages d’emmener son enfant à l’hôpital, à lui assurer que MSF fournirait le transport et les médicaments. Elle a hésité parce qu’elle ne voulait pas laisser ses deux autres enfants dans le camp. Lorsque nous lui avons promis qu’elle pourrait voyager avec les trois, elle a fini par accepter et est allée chercher ses affaires.

Aisha travaillait déjà à MSF en 2020, dans les camps de l’État du Nil Blanc. Elle est revenue lorsque MSF a repris ses activités dans ces camps en juin 2023, en réponse à la crise aggravée par le conflit. Soudan, 2023. © MSF

À son retour, j’ai constaté avec surprise que pas seulement un, mais tous les enfants étaient malades. Je lui ai demandé pourquoi elle ne nous avait pas parlé de l’état de santé des deux autres. En fait, elle pensait que nous ne pourrions pas les prendre tous en charge. Finalement, nous avons réussi à faire en sorte que les trois enfants soient envoyés à l’hôpital.

Je suis moi aussi une personne déplacée à l’intérieur de mon pays et je comprends donc bien les difficultés de la communauté. Concilier mon rôle en promotion de la santé et mes propres expériences peut s’avérer compliqué. En écoutant les histoires des gens ici, je me rappelle que chacun d’eux a son expérience particulière.     

Malgré le volume de travail que nous accomplissons pour apporter une aide humanitaire dans trois camps, ce n’est pas facile et les besoins sont énormes. Mais je suis reconnaissante d’avoir une équipe solide à mes côtés, et j’apprécie la dynamique de l’équipe dans laquelle je me sens soutenue, jour après jour.