A man receives a dose of COVID-19 vaccine at the MSF vaccination center in Bar Elias (Bekaa Valley). © Tracy Makhlouf/MSF
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Pourquoi MSF veut-elle que le Canada exige un meilleur retour sur ses investissements en R et D médicale?

Médecins Sans Frontières (MSF) demande au gouvernement canadien d’attacher des conditions simples à l’argent qu’il dépense chaque année en recherche et développement (R et D) médical afin de veiller à ce que ce financement public serve à améliorer la santé publique plutôt que de favoriser les profits privés du secteur pharmaceutique. Pourquoi est-ce important pour une organisation médicale d’urgence internationale comme MSF? Lisez les questions-réponses suivantes pour le savoir.

Pourquoi MSF se soucie-t-elle du financement gouvernemental de la R et D médicale au Canada?

Chaque année, le gouvernement du Canada dépense des millions de dollars en R et D médicale. Il s’agit d’un investissement essentiel dans la santé publique canadienne et mondiale. Sans ce type de financement public de la part du Canada et d’autres gouvernements dans le monde, de nombreux vaccins et autres médicaments urgemment nécessaires n’existeraient tout simplement pas, car les sociétés pharmaceutiques considèrent que leur développement n’est pas suffisamment lucratif.

Cela est particulièrement vrai pour les maladies et autres menaces pour la santé publique qui touchent principalement les personnes dans les pays à faible revenu, y compris dans de nombreux endroits où MSF travaille. Mais il en va de même au Canada quand une maladie ou autre risque pour la santé publique n’offre pas de perspectives intéressantes en termes de profits.

S’il n’en tenait qu’aux entreprises pharmaceutiques, en l’absence de financement public pour la R et D nécessaire, de nombreuses innovations médicales vitales – notamment celles dont les équipes MSF ont besoin chaque jour pour répondre aux urgences sanitaires mondiales – ne verraient jamais le jour.

Mais si le Canada finance déjà la R et D médicale, quelles sont les préoccupations de MSF?

Le financement public de la R et D médicale est essentiel, et le Canada investit depuis longtemps dans la recherche critique en santé. Mais financer la mise au point de nouveaux médicaments ne compte pas pour grand-chose si les personnes qui en ont le plus besoin n’y ont pas accès.

Le Canada dépense des millions de dollars en fonds publics pour soutenir la R et D médicale, mais laisse toujours aux sociétés pharmaceutiques le soin de commercialiser les produits qui en résultent – et leur permet de facturer les prix qu’elles veulent, même lorsque les patients et les systèmes de santé les plus désespérés pour ces médicaments n’ont pas les moyens de se les payer.

Cela signifie que même lorsque le gouvernement du Canada assume les coûts de la R et D (et les risques financiers) pour les médicaments vitaux, ce sont toujours les sociétés pharmaceutiques qui décident qui a accès à ces médicaments et à quel prix, privant souvent certaines des communautés les plus vulnérables du monde des outils de santé qu’elles requièrent de toute urgence.

Alors, qu’est-ce que MSF demande au Canada de faire?

Le Canada peut prendre des mesures très simples pour s’assurer que le financement public qu’il consacre à la R et D médicale sert à répondre aux besoins de santé publique plutôt qu’à subventionner une industrie pharmaceutique déjà rentable; il lui suffit de rendre tout financement de la R et D médicale ou de la fabrication associée conditionnel à l’abordabilité des médicaments et vaccins résultants et à leur accessibilité à l’échelle mondiale.

Les vaccins COVID-19 doivent être abordables et accessibles à tous.

En assortissant le financement accordé de conditions quant à l’accès et à l’abordabilité mondiales, le Canada peut garantir que ses investissements publics dans la R et D médicale répondront aux besoins de santé publique, tant au Canada qu’ailleurs dans le monde. MSF demande au Canada d’ajouter immédiatement ce genre de conditions à ses dépenses en R et D médicale, afin que MSF et les autres prestataires de soins de santé dans le monde puissent compter sur l’abordabilité des nouveaux médicaments et vaccins essentiels pour nous et nos patients.

Les sociétés pharmaceutiques qui vendent des médicaments mis au point avec des fonds publics sont-elles généralement tenues de rendre leurs produits plus accessibles et abordables?

 

Non, mais elles devraient l’être.

La COVID-19 illustre bien cette réalité. La pandémie a mis en évidence tout ce qu’il est possible d’accomplir lorsque les gouvernements consacrent des ressources significatives à la R et D. La création non pas d’un seul mais de plusieurs vaccins efficaces contre une maladie jusqu’alors inconnue en si peu de temps est sans précédent.

Mais maintenant, les sociétés pharmaceutiques gagnent des milliards de dollars grâce aux vaccins contre la COVID-19 en privilégiant les ventes aux marchés les plus lucratifs du monde, et non aux pays qui en ont le plus besoin – même si de nombreux pays à faible revenu n’ont pas encore reçu suffisamment de doses pour vacciner ne serait-ce que 10 % de leur population. Les habitants de ces endroits sont ainsi davantage exposés au virus, et le reste du monde court un risque accru face aux variants qui émergeront dans les régions où les taux de vaccination sont faibles.

Cette dangereuse disparité est autorisée à se produire malgré le fait que ces sociétés n’ont pas elles-mêmes développé ces vaccins. Loin de là. En fait, sans le soutien du gouvernement, ces vaccins n’existeraient pas. Dans certains cas, la mise au point de vaccins contre la COVID-19 a été financée par des fonds publics à hauteur de 97 %.

 

Malheureusement, malgré un financement public généreux, de nombreux fabricants de ces vaccins ont privilégié les profits privés plutôt que l’accès des patients. Les gouvernements doivent faire en sorte que l’accès aux fonds publics garantisse au public l’accès aux médicaments et aux vaccins qu’ils contribuent à mettre au point. C’est exactement ce que MSF demande au Canada de faire.

S’il s’agit d’un problème mondial, pourquoi MSF se concentre-t-elle sur le Canada?

 

MSF appelle les gouvernements du monde entier à faire passer la vie avant les profits, en exigeant que les sociétés pharmaceutiques qui bénéficient d’un financement public pour la R et D médicale soient tenues de rendre tous les médicaments vitaux accessibles et abordables pour ceux qui en ont le plus besoin.

Le Canada occupe une place particulièrement importante dans cette conversation. Non seulement le Canada compte des chercheurs parmi les meilleurs au monde en sciences de la santé, mais le gouvernement canadien investit déjà dans une R et D médicale capable de changer la vie de certains des patients de MSF dans le monde.

Le laboratoire national de microbiologie du Canada à Winnipeg, par exemple, a découvert des vaccins potentiels contre le virus de Marburg (une maladie semblable à Ebola) et la fièvre hémorragique de Lassa, une maladie répandue dans certaines parties de l’Afrique de l’Ouest. D’autres scientifiques canadiens travaillent actuellement sur des vaccins contre des maladies comme la tuberculose et la schistosomiase, une maladie parasitaire. Les vaccins contre ces maladies pourraient être extrêmement importants pour les personnes et les communautés avec lesquelles MSF travaille.

Financer de façon appropriée ces précieux outils de santé publique est une première étape extrêmement importante, mais nous devons tous nous attendre à ce que ceux-ci soient abordables, accessibles et disponibles là où ils sont le plus nécessaires. « Les médicaments ne devraient pas être un luxe. »

C’est pourquoi MSF demande au Canada d’agir maintenant et d’attacher des conditions aux millions de dollars qu’il dépense chaque année en R et D médicale, afin de garantir que les patients de MSF aient accès aux médicaments et aux vaccins dont ils ont besoin. Non seulement s’agit-il d’une façon sensée d’assurer un retour sur l’investissement public, mais cela aidera la population du Canada et d’ailleurs à accéder à de nouveaux médicaments et vaccins qui peuvent sauver des vies, soulager les souffrances et protéger la santé publique mondiale.

 

 

Pour en savoir plus sur les appels de MSF envers le Canada pour qu’il accorde plus d’importance à la vie qu’aux profits et qu’il assortisse des conditions d’abordabilité et d’accessibilité au financement de la R et D médicale, visitez notre page de campagne La vie avant le profit : les actions du Canada comptent .

Vous pouvez également lire les dures leçons apprises lorsque l’une des percées les plus importantes en santé publique au Canada – un vaccin contre Ebola efficace mis au point au Laboratoire national de microbiologie au début des années 2000 – n’était pas disponible pour sauver des vies pendant la plus grande épidémie de la maladie au monde, parce que le Canada l’avait vendu à une entreprise privée qui préférait le laisser sur une étagère plutôt que d’en faire profiter le monde  : Fonds publics, échec privé : Le vaccin contre Ebola mis au point au Canada aurait pu sauver plus de vies souligne comme le financement de la R et D sans condition prive des communautés vulnérables des médicaments dont elles ont urgemment besoin.