Aristote Saidi Wanyama, agent de promotion de la santé de MSF, présente les symptômes et les signes de la mpox lors d’une réunion avec les leaders des personnes qui vivent sur le site de déplacement de Kanyaruchinya.
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« Dans l’est de la RDC, le mpox n’est qu’un défi de plus dans un océan de problèmes. »

La Dre Tejshri Shah
directrice générale Belgique MSF

La Dre Tejshri Shah, directrice générale de Médecins Sans Frontières (MSF) Belgique et pédiatre spécialisée dans les maladies infectieuses, est récemment rentrée du Nord-Kivu, une province orientale de la République démocratique du Congo (RDC). Le pays est l’épicentre de l’épidémie de variole simienne, aussi connue sous le nom de mpox, qui sévit actuellement en Afrique. Dans ce court article, elle souligne que l’endiguement du virus dans les sites de personnes déplacées de l’est de la RDC restera impossible si l’on ne s’efforce pas d’écouter les besoins des communautés et d’améliorer les conditions de vie épouvantables dans lesquelles elles se débattent depuis trop longtemps.

À Goma, de nombreuses personnes à qui j’ai parlé semblent sentir que quelque chose de nouveau, d’incertain et d’effrayant est en train de se produire. Mais personne ne peut encore prédire ce que cela signifiera, ou à quel point cela aura un impact sur leur vie.

La mpox n’est pas nouvelle en RDC. La maladie est endémique dans plusieurs régions du pays et les notifications de cas sont en augmentation depuis une dizaine d’années. Cependant, dans les Kivu, le virus a muté en une forme qui semble être plus transmissible entre humains. Cela est préoccupant. En effet, des cas ont été signalés dans des zones très densément peuplées comme Goma – une ville qui compte deux millions d’individus. D’autres ont été signalés dans les sites de personnes déplacées qui l’entourent, où des centaines de milliers de personnes ont trouvé refuge en raison du conflit armé au Nord-Kivu.

Si le taux de létalité de cette nouvelle souche reste limité, il y a tout de même lieu de s’inquiéter, car les conditions nécessaires pour empêcher sa propagation à Goma et dans ses environs ne sont pas réunies. Et parce que la capacité à fournir des soins aux individus qui présentent des risques de complications, comme les jeunes enfants ou les personnes à un stade avancé du VIH, reste limitée.

Comment peut-on attendre de familles qui vivent dans de minuscules abris, sans eau ni installations sanitaires adéquates, voire même sans savon, qu’elles mettent en œuvre les mesures préventives préconisées? Comment des enfants souffrant de malnutrition peuvent-ils avoir la force de lutter contre les complications de la mpox? Et comment pouvons-nous espérer que cette variante, qui se transmet notamment par contact sexuel, ne se propage pas dans les sites de déplacement, étant donné les niveaux dramatiques de violence sexuelle et d’exploitation qui touchent les filles et les femmes?

MSF a dénoncé à de nombreuses reprises les conditions de vie inhumaines dans ces sites, ainsi que les lacunes flagrantes de la réponse humanitaire. Plus de deux ans après le début de la crise dite « M-23 » et les déplacements massifs qu’elle a provoqués, les personnes qui vivent dans les sites surpeuplés manquent toujours de tout : nourriture, eau, sécurité, articles d’hygiène de base, ainsi que l’accès à l’assainissement et aux soins de santé.

Au cours d’une réunion à laquelle j’ai assisté avec des survivantes de violences sexuelles, une femme m’a dit qu’elle vivait avec ses sept enfants sous une bâche en plastique. Son partenaire l’avait abandonnée à la suite du viol. Pour des femmes comme elle, la difficulté que représente la mise en œuvre des solutions classiques destinées à prévenir la propagation de l’épidémie est inimaginable.

Si cette femme développe une éruption cutanée, on lui dira de changer de linge, de tout laver soigneusement, de désinfecter ses affaires et de s’isoler jusqu’à sa guérison. Mais comment se laver sans savon et avec seulement quelques litres d’eau par jour? Comment s’isoler et protéger ses enfants alors qu’ils vivent ensemble sous leur minuscule abri en bâche plastique? Si elle s’isole, qui ira chercher de la nourriture pour les enfants? Qui ramassera le bois de chauffage?

Pour elle et tous ceux et celles qui ont trouvé refuge dans les sites de personnes déplacées, l’épidémie de mpox n’est qu’un défi de plus dans un océan de problèmes. Et, à vrai dire, pas le défi le plus urgent, compte tenu des difficultés quotidiennes auxquelles les personnes déplacées sont confrontées, notamment les épidémies d’autres maladies potentiellement mortelles comme la rougeole ou le choléra.

Pour relever le nouveau défi que représente la mpox, il faut de toute urgence améliorer les conditions de survie des gens. Il faut en outre apporter une réponse adaptée à leurs besoins spécifiques et aux défis que ces personnes rencontrent dans la vie réelle.

Cela commence par les écouter. Comprendre leurs besoins. Et mettre à leur disposition ce qui est nécessaire pour le contrôle des infections : eau, savon, désinfectant, installations sanitaires.

Ce sont des choses simples, mais essentielles. Nous ne pouvons pas compter uniquement sur l’arrivée des vaccins pour résoudre le problème.

En collaboration avec les autorités sanitaires, nos équipes font de leur mieux pour fournir des soins et sensibiliser les personnes vivant sur les sites, comme nous le faisons dans d’autres régions du pays touchées par l’épidémie.

Comme beaucoup d’autres, nous espérons que les vaccins tant attendus arriveront dans le pays le plus rapidement possible. Cependant, ces vaccins ne constitueront pas une solution miracle. Les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux doivent également se pencher de toute urgence sur les fondements de la réponse à la mpox, qui doit être adaptée aux besoins et aux réalités des gens.