A man receives a dose of COVID-19 vaccine at the MSF vaccination center in Bar Elias (Bekaa Valley). © Tracy Makhlouf/MSF
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Nouveau rapport de MSF : Les pays à revenu élevé doivent cesser de garder 870 millions de doses excédentaires de vaccins contre la COVID-19 et les redistribuer pour sauver des vies

Médecins Sans Frontières (MSF) appelle les gouvernements à s’engager publiquement, d’ici la fin octobre 2021, à redistribuer des vaccins contre la COVID-19, en se donnant des objectifs mensuels.

Ottawa, 6 octobre 2021 – Un nouveau rapport de MSF prévient que des millions de personnes risquent de mourir de la COVID-19 si les pays à revenu élevé, dont une poignée accumule quelque 870 millions* de doses excédentaires, y compris le Canada, ne commencent pas immédiatement à redistribuer ces doses aux pays à revenu faible et intermédiaire via le mécanisme COVAX ou des organismes régionaux tels que l’Union africaine, via l’Africa Vaccine Access Trust (AVAT) et l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS). MSF appelle ces gouvernements, dont le gouvernement canadien, à définir un calendrier de redistribution concret d’ici la fin octobre pour sauver des vies : si les doses disponibles dans les pays à revenu élevé comme le Canada sont redistribuées rapidement et régulièrement aux pays à revenu faible et intermédiaire, on estime que près d’un million de décès pourront être évités d’ici la mi-2022.

Jason Nickerson | Representant humanitaire De Msf Au Canada

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« En termes simples, le Canada et d’autres pays conservent des millions de doses de vaccins contre la COVID-19 dans des congélateurs tandis que d’autres, y compris de nombreux pays à faible revenu où MSF affronte la COVID-19, tentent désespérément de vacciner leurs plus vulnérables, ne serait-ce qu’avec une première dose », explique Jason Nickerson, représentant humanitaire de MSF au Canada. « Pour mettre fin à la pandémie de COVID-19 et protéger tout le monde du virus, la couverture vaccinale mondiale doit augmenter beaucoup plus rapidement. Pour ce faire, il faut de toute urgence que les pays qui ont acheté plus de doses qu’ils n’en ont réellement besoin, dont le Canada, prennent des engagements publics et concrets avec des délais ambitieux pour redistribuer régulièrement leurs excès de vaccins contre la COVID-19. »

En tant que pays qui a obtenu le plus grand nombre de doses excédentaires par habitant au monde – cinq fois plus de doses que sa population n’en avait besoin – le Canada doit en faire plus pour assurer la redistribution des doses. Par exemple, le Canada s’est engagé à faire don de 40,7 millions de doses de vaccin en nature au COVAX. Cependant, bien que le Canada disposait de suffisamment de doses pour vacciner complètement tous les Canadiens admissibles avant la fin juillet, pas une seule dose promise au COVAX n’a été livrée avant septembre. Qui plus est, le Canada n’a pas fourni de mises à jour facilement accessibles sur l’état de ses dons; à la fin septembre, MSF estimait que moins de trois millions – soit bien en deçà de 10 % – des doses promises par le Canada avaient été livrées aux pays qui en avaient besoin. En plus de son engagement envers le COVAX, le Canada a également fait une série de dons bilatéraux depuis août, totalisant à ce jour un peu plus de 750 000 doses; entre-temps, selon les médias, à la fin septembre, le Canada disposait d’un stock de plus de 18 millions de doses inutilisées et susceptibles de devenir périmées.

Il existe un large fossé entre les pays qui ont des doses de vaccin contre la COVID-19 à administrer et ceux qui n’en ont pas : plus de 60 % des personnes dans les pays à revenu élevé ont reçu au moins une dose, comparativement à moins de 3 % dans les pays à faible revenu. Parallèlement, les pays à revenu élevé détiennent des millions de doses excédentaires qui pourraient devenir périmées si elles ne sont pas redistribuées de toute urgence; à eux seuls, les pays du G7 et de l’UE pourraient gaspiller 241 millions de doses d’ici la fin de 2021, même après les rappels pour les groupes hautement vulnérables et la distribution des dons promis d’ici la fin de 2021. Alors que de nombreux dirigeants mondiaux se sont engagés à redistribuer les doses d’ici la fin de 2021 ou jusqu’en 2022, le monde a besoin de mesures immédiates pour réduire les inégalités en matière de vaccins. Le Canada et les autres pays à revenu élevé doivent redistribuer leurs doses excédentaires maintenant, bien avant leur date de péremption, et veiller à ce que les doses se rendent à destination en aidant les pays d’accueil à surmonter les contraintes logistiques et techniques.

Malgré le besoin désespéré de vaccins dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les sociétés pharmaceutiques continuent de les vendre en priorité aux pays les plus riches. Pfizer-BioNTech et Moderna ont consenti respectivement 78 % et 85 % de leurs livraisons de vaccins contre la COVID-19 aux pays à revenu élevé, et on estime leurs revenus à  26 milliards de dollars et 19,2 milliards de dollars, respectivement, découlant des ventes de vaccins contre la COVID-19 pour la seule année 2021.** En outre, aucun fabricant de vaccin contre la COVID-19 n’a partagé sa technologie avec le centre de transfert de technologie pour les vaccins à ARNm contre la COVID-19 dirigé par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en Afrique du Sud, laissant peu de possibilités aux fabricants potentiels dans les pays à revenu faible et intermédiaire d’en produire.

 

Plus de 60 % des habitants des pays à revenu élevé ont reçu au moins une dose d’un vaccin contre la COVID-19, comparativement à moins de 3 % des habitants des pays à faible revenu.

 

Comme les sociétés pharmaceutiques accordent la priorité aux profits et non à la santé publique, les pays à revenu faible et intermédiaire, le COVAX et les organismes régionaux ont de la difficulté à obtenir des doses. Le COVAX a récemment dû réduire ses prévisions d’approvisionnement pour 2021 d’environ 25 % en raison des retards d’expédition de plusieurs fabricants, et alors qu’au début de l’année, l’OMS avait fixé un objectif prudent de couverture vaccinale de 10 % pour chaque pays du monde d’ici la fin septembre. Cinquante-six pays n’ont pas atteint cet objectif. Si les faibles taux de vaccination se maintiennent dans un pays donné, il est plus probable que de nouveaux variants émergent, notamment des variants plus préoccupants, comme le Delta, qui constituent une menace pour les systèmes de santé du monde entier et pourraient prolonger la pandémie.

« Depuis le début de la pandémie, MSF a appelé les gouvernements et les sociétés pharmaceutiques à privilégier la vie plutôt que les profits par le biais d’une coopération mondiale pour intensifier rapidement la fabrication de vaccins, s’engager à des prix équitables et prioriser les distributions de vaccins aux populations les plus vulnérables partout dans le monde. Que les sociétés pharmaceutiques aient fait passer leurs profits en premier, approvisionnant avant tout le monde les pays riches prêts à payer des prix élevés, a coûté des vies et est tout simplement honteux », note Jason Nickerson.

 

Jason NickersonR | Representant Humanitaire De Msf Au Canada

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« Le Canada et d’autres pays doivent changer de cap et rectifier cette injustice mortelle. Pour y arriver, nous avons besoin que les pays collaborent et qu’ils accélèrent la redistribution de leurs doses excédentaires de vaccin qui sont stockées dans des congélateurs pour qu’elles parviennent sans tarder aux pays qui attendent toujours. La redistribution des doses est une mesure provisoire d’urgence visant à acheminer rapidement les vaccins là où ils sont nécessaires, et elle doit se faire en même temps que le partage de technologie et de savoir-faire par les sociétés pharmaceutiques avec des fabricants capables de produire des doses. Ces mesures sont nécessaires pour que les régions et les pays laissés pour compte en matière d’accès aux vaccins puissent devenir davantage autosuffisants pour produire des vaccins contre la COVID-19 et d’autres agents pathogènes à potentiel pandémique. »