On the afternoon of June 27, the MSF team rescued 71 people from a rubber boat in distress. 22 people are missing, three persons were stabilized, including very young children, and one women died later on board after 30 minutes of resuscitation. A woman and her baby in critical state were also evacuated to Malta during the same night. This is another tragic rescue in the Central Mediterranean and everyone is in a very weak condition and traumatized. The MSF medical team on board is looking after the survivors until disembarkation in a place of safety. © Anna Pantelia/MSF
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Geo Barents : vingt-deux personnes disparues et un décès au terme d’un sauvetage tragique

Au moins 22 personnes ont été portées disparues, et malgré les efforts désespérés pour la réanimer, une femme enceinte est morte lors du naufrage partiel d’un bateau pneumatique dans la mer Méditerranée centrale. L’équipe de recherche et sauvetage de Médecins Sans Frontières (MSF) a rescapé 71 personnes de l’embarcation qui était en train de sombrer pour les transférer à bord du Geo Barents, son navire de recherche et sauvetage. L’organisation exhorte maintenant les autorités maltaises et italiennes à lui permettre de débarquer les rescapé·e·s dès que possible.

Un bateau en détresse a été intercepté par les gardes-côtes libyens avant que le Geo Barents ne puisse lui venir en aide. Quelques heures plus tard, Alarm Phone [1] a émis une alerte concernant un autre bateau en détresse dans la région, à laquelle nous avons répondu. L’équipe du Geo Barents a navigué pendant trois heures avant d’atteindre ce bateau qui venait de céder et qui coulait, alors que les personnes qui y prenaient place, dont plusieurs étaient déjà dans l’eau, tentaient de sauver leur vie.

L’équipe de MSF a porté secours aux naufragé·e·s; une femme enceinte transportée à bord n’a pas survécu malgré tous les efforts déployés par l’équipe médicale pour la réanimer. Trois autres personnes ont dû recevoir des soins d’urgence, dont un bébé de quatre mois. Le bébé et sa mère ont ensuite été évacué·e·s à Malte. Aujourd’hui, l’équipe de MSF s’occupe des personnes rescapées restées à bord, dont la plupart sont extrêmement faibles et en état de choc.

Le pire cauchemar

« Hier, nous avons vécu notre pire cauchemar. Lorsque nous nous sommes approchés du bateau en détresse et que nous avons pu le voir avec nos jumelles, nous avons compris à quel point ce sauvetage serait compliqué », raconte Riccardo Gatti, responsable de l’équipe de recherche et sauvetage à bord du Geo Barents. « L’embarcation était en train de sombrer avec les dizaines de personnes qui y prenaient place. Plusieurs autres étaient déjà dans l’eau. »

L’équipe continue de recueillir des informations sur les personnes disparues; deux femmes nous ont dit avoir perdu leurs enfants en mer et une autre jeune femme affirme avoir perdu son petit frère. Des informations sur plus d’une douzaine d’autres personnes disparues ont été recueillies lors d’entretiens avec les rescapé·e·s.

Il s’agit d’un autre sauvetage tragique en Méditerranée centrale; toutes et tous sont affaibli·e·s et traumatisé·e·s. L’équipe médicale de MSF à bord s’occupe des rescapé·e·s jusqu’à leur débarquement dans un lieu sûr.

« Les survivants et les survivantes sont épuisé·e·s; ces personnes ont ingéré de grandes quantités d’eau de mer, et plusieurs étaient en état d’hypothermie après avoir passé de nombreuses heures dans l’eau », explique Stephanie Hofstetter, responsable de l’équipe médicale de MSF sur le Geo Barents. « Au moins 10 personnes, principalement des femmes, souffrent de brûlures de carburant modérées à graves et doivent recevoir des traitements plus avancés que ce que nous pouvons leur prodiguer à bord. »

« Cet événement traumatisant est une conséquence mortelle de l’inaction et du désengagement croissants des États européens et d’autres pays frontaliers, y compris l’Italie et Malte, en Méditerranée », explique Juan Matias Gil, représentant de MSF en recherche et sauvetage. « Les tragédies en mer continuent de coûter des milliers de vies, et ces personnes meurent aux portes de l’Europe dans le silence et l’indifférence absolus des États membres de l’Union européenne. »

La frontière la plus meurtrière du monde

« Les organisations de recherche et sauvetage ne peuvent pas combler à elles seules cet énorme vide. Nous n’avons pas cette capacité, et qui plus est, cette responsabilité revient aux gouvernements », dit Juan Matias Gil. « Ce qui s’est passé hier montre que, seuls, nous ne pouvons pas en faire assez. Où sont les États? »

Aujourd’hui, la mer Méditerranée reste la frontière la plus meurtrière au monde, avec 24 184 migrants et migrantes disparu·e·s depuis 2014 [2] et 721 pour la seule année 2022. Les États membres de l’UE et les États frontaliers de la mer Méditerranée condamnent des personnes à se noyer à cause de leurs politiques de non-assistance. MSF exhorte tous les États membres de l’UE à fournir une capacité de recherche et sauvetage dirigée par l’État, dédiée et proactive en Méditerranée centrale, et à répondre rapidement et adéquatement à tous les appels de détresse.

« Nous sommes restés en mer pendant 19 heures avant d’être sauvés », raconte un homme originaire Cameroun secouru la nuit dernière et maintenant en sécurité à bord du Geo Barents. « Durant toutes ces heures, j’ai vu beaucoup de gens se noyer. Je suis heureux d’avoir été secouru, mais ma joie s’accompagne de beaucoup de larmes. »

Le Geo Barents se dirige maintenant vers l’Italie et a contacté les autorités maltaises et italiennes à la recherche d’un port sûr. MSF demande un débarquement rapide et sûr des rescapé·e·s dès que possible pour éviter d’augmenter leur détresse et d’aggraver leur état psychologique.

[1] Alarm Phone – Assistance téléphonique pour les personnes traversant la mer Méditerranée vers l’UE

[2] Projet Migrants Disparus, OIM, 22 juin 2022