Ukraine : MSF tient des cliniques mobiles dans les stations de métro de Kharkiv
Depuis le début de la guerre en Ukraine, Kharkiv, la deuxième plus grande ville du pays, a été durement touchée par l’offensive russe. Alors que plusieurs ont fui la ville en raison du conflit, tous ceux et celles qui y sont resté·e·s ont trouvé refuge dans des stations de métro pour échapper aux bombardements incessants. Les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) descendent dans plusieurs de ces stations pour y offrir des consultations en soins de santé primaires.
Avant la guerre, Kharkiv comptait une population 1,8 million de personnes, mais la ville s’est partiellement vidée au cours des dernières semaines. « La ville semble maintenant plutôt déserte. Peu de gens circulent dans les rues, et la plupart des magasins sont fermés », observe Michel-Olivier Lacharité, directeur national de MSF en Ukraine. « Il y a encore quelques pharmacies et marchés qui sont ouverts pour que les gens puissent acheter de la nourriture, mais le marché principal à Kharkiv est fermé. »
Depuis le début du conflit, les bombardements se succèdent, en particulier dans la partie nord de la ville. « Les bombardements se poursuivent encore toute la journée, de façon assez aléatoire. Les sirènes avertissent les gens quand ça arrive. Il y a aussi un système d’alerte sur les téléphones intelligents. Ces sonneries retentissent plusieurs fois par jour. C’est très anxiogène », dit Michel-Olivier Lacharité.
Pour les 350 000 personnes qui, selon les autorités locales, sont restées dans la ville, le métro est l’endroit le plus sûr. « Il y a trois lignes dans la ville de Kharkiv, et la plupart des stations sinon toutes sont utilisées », explique Michel-Olivier Lacharité. Chaque station accueille environ 100 personnes pendant la journée, un nombre qui peut facilement doubler ou tripler la nuit. « La plupart des personnes qui vivent dans le métro sont âgées ou en situation de vulnérabilité. Elles y sont depuis plus de 40 jours dans le froid et l’humidité, et elles dorment dans des tentes. »
Cliniques de santé mobiles
MSF a mis en place des cliniques mobiles dans plusieurs stations, et ce, sur les trois lignes de métro de Kharkiv. Certaines consultations ont lieu la nuit. Malgré le couvre-feu qui sévit dans la ville, les équipes peuvent se déplacer d’une station à l’autre en empruntant les tunnels. Plus de 510 consultations médicales ont déjà eu lieu depuis le début des activités, principalement pour des infections des voies respiratoires et l’hypertension, conséquences des conditions de vie dans le métro et du stress.
« Même dans le métro, on peut entendre les vibrations des bombardements à la surface », dit Michel-Olivier Lacharité.
Nina, 83 ans, n’était qu’un bébé lors de la Seconde Guerre mondiale. « J’ai trop peur de quitter ma ville, je ne suis jamais allée à l’étranger. J’aime trop Kharkiv! » dit-elle avec un sourire triste. « Ses parcs, ses places. Mais les bombes risquent de tout détruire. Je crains qu’il ne reste plus que des ruines. »
En plus des consultations médicales, MSF offre également du soutien en santé mentale. Pour les jeunes enfants, les adolescents et les adolescentes qui vivent maintenant dans le métro, le facteur de stress le plus courant est la peur d’aller à l’extérieur.
Santé mentale et conditions de vie
« Le potentiel de comportement induit par l’anxiété augmente à mesure que la guerre et l’instabilité se poursuivent et que l’insécurité devient une caractéristique permanente de la vie. Néanmoins, les enfants ici composent assez bien avec la situation pour le moment », explique Devash Naidoo, responsable des activités de santé mentale de MSF.
Les équipes de MSF distribuent également des articles indispensables à la vie quotidienne : des fours à micro-ondes pour chauffer la nourriture, des détergents pour le nettoyage et des filtres à eau pour assurer la distribution d’eau potable, la nuit. « Il y a des tentes et des lits de fortune installés partout, ce qui signifie que la situation sanitaire dans ces stations n’est pas toujours idéale », affirme Guillaume Mongeau, médecin de MSF.
Malgré les conditions de vie, rester dans le métro est la seule option pour plusieurs. « Le froid, le manque de sommeil, tout cela n’est rien comparé à la guerre. Au moins ici, nous sommes en sécurité », dit Ludmilla, 40 ans. Elle est restée chez elle avec sa famille aussi longtemps qu’elle a pu, jusqu’à ce qu’une explosion survienne tout près de leur maison. « J’ai eu très peur pour mon fils quand je l’ai vu serrer notre chat très fort contre sa poitrine en disant “maman, je ne veux pas mourir”. »