Dans le camp de Metche, des personnes déposent leurs bidons en ligne afin d’obtenir de l’eau potable au point de distribution de MSF. De l'eau est distribuée deux fois par jour, mais il n'y en a jamais assez. Le camp reçoit environ 6 litres d'eau par personne et par jour, ce qui est bien inférieur aux 20 litres d'eau par personne et par jour recommandés. Tchad, 2023. © Linda Nyholm/MSF
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Tchad : les équipes MSF se hâtent de trouver de nouvelles sources d’eau, alors que les risques pour la santé des personnes réfugiées s’aggravent

  • Les personnes réfugiées et rapatriées dans l’est du Tchad manquent cruellement d’eau potable. Dans le camp de Metche, elles ne reçoivent que six litres d’eau par personne et par jour, alors que 20 litres sont recommandés dans les situations d’urgence.
  • Le manque d’eau potable, de latrines et de gestion des déchets présente un risque majeur pour la santé publique, selon MSF.  Ses équipes médicales constatent une augmentation des affections cutanées, des infections gastro-intestinales et des diarrhées aqueuses aiguës.  
  • Les spécialistes en eau et en assainissement de MSF se hâtent d’identifier de nouvelles sources d’eau. Ces équipes cherchent à augmenter la quantité d’eau disponible pour les personnes réfugiées à Metche et dans d’autres camps de la région.

Les personnes déplacées du Soudan qui s’abritent dans des camps à l’est du Tchad vivent dans des conditions désastreuses, manquant cruellement d’eau potable et d’installations sanitaires en bon état. Les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) fournissent de l’eau et aident à l’assainissement dans trois camps de la région frontalière.

Quelque 40 000 personnes dans le camp de Metche ne reçoivent que six litres d’eau par personne et par jour pour boire, cuisiner et se laver. Ces quantités sont bien inférieures aux 20 litres d’eau par personne et par jour recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans les situations d’urgence. Le manque d’eau, de latrines et d’une gestion adéquate des déchets présente un risque sérieux pour leur santé, selon les médecins de MSF. Ceux-ci traitent un nombre croissant de gens pour des affections cutanées, des infections gastro-intestinales et des diarrhées aqueuses aiguës, qui sont particulièrement dangereuses pour les enfants dénutris.

Le Tchad est depuis longtemps confronté à la pénurie d’eau, mais la pression sur les ressources dans des endroits comme Metche a atteint un niveau critique. Après l’éclatement de la guerre au Soudan en avril 2023, un grand nombre de personnes réfugiées soudanaises et de personnes rapatriées d’origine tchadienne ont traversé la frontière pour se rendre au Tchad. D’abord hébergées dans des camps de transit dans la ville d’Adré, certaines d’entre elles ont ensuite été relocalisées dans des camps à travers la province. Début septembre, environ 40 000 personnes ont été réinstallées à Metche, une région aride éloignée située à 40 km d’Adré. Trois mois plus tard, alors que la saison des pluies est terminée, elles sont confrontées à de graves pénuries d’eau.

Exploiter les méthodes traditionnelles de collecte de l’eau

Jusqu’à récemment, la région de Metche ne disposait d’aucune infrastructure moderne d’approvisionnement en eau. Sa population de 2 000 à 5 000 personnes dépendait des méthodes traditionnelles de collecte de l’eau dans les lits asséchés des rivières, ou wadis, et des puits creusés par les agricultrices et agriculteurs locaux.

Les équipes spécialistes en eau et en assainissement de MSF ont travaillé en urgence pour creuser des puits. Le camp et la communauté d’accueil reçoivent maintenant quelque 160 000 litres d’eau par jour. Les six litres d’eau par personne et par jour que cela représente sont toutefois insuffisants pour que les gens survivent sans que leur santé soit compromise. Les équipes de MSF continuent de chercher d’urgence de nouvelles sources d’eau, notamment en creusant de nouveaux puits – un processus mécanisé qui prend du temps et coûte cher.

« Travailler dans cette région pose des problèmes logistiques en raison de son éloignement et du mauvais état des routes », explique Paul Jawor, conseiller en eau et en assainissement de MSF. « Mobiliser des entreprises de forage ici prend du temps – du temps que les gens n’ont pas. »

Tchad, 2023. © Linda Nyholm/MSF

« Pour répondre plus rapidement à l’urgence, nous utilisons les connaissances et les méthodes de collecte de l’eau de la communauté, tout en introduisant des outils pour accélérer la collecte de l’eau », mentionne Paul Jawor.

Travaillant en étroite collaboration avec la communauté locale, les spécialistes en eau et en assainissement de MSF diversifient leurs méthodes en utilisant les moyens traditionnels de collecte de l’eau.

« Les gens sont habitués à aller chercher de l’eau dans les oueds asséchés, et ils continuent à le faire, car la quantité d’eau que nous pouvons distribuer actuellement est insuffisante », explique Paul Jawor. « Avec les personnes qui dirigent la communauté, nous avons mis en œuvre un système d’adduction d’eau dans le lit de la rivière asséchée. Cela permet de récupérer l’eau de pluie qui s’est infiltrée dans le sable au cours de la saison des pluies précédente. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une solution permanente, ce système peut soulager immédiatement une partie de la crise de l’eau et pourrait être utilisé à l’avenir par la communauté locale. »

Malgré les efforts des équipes de MSF pour identifier et implanter de nouvelles sources d’eau, il reste beaucoup d’incertitude concernant la quantité et la qualité de l’approvisionnement en eau souterraine disponible.

Augmentation des risques sanitaires

Certaines personnes du camp de Metche n’ont même pas accès à six litres d’eau par jour, en particulier celles qui vivent loin d’un point de distribution d’eau. L’approvisionnement en eau salubre étant si limité, les gens sont obligés de prioriser son utilisation.

« Les mères nous disent qu’elles ont 20 litres d’eau pour sept personnes dans leur maison », explique Marina Pomares Fuentes, référente médicale du projet MSF. « Elles sont obligées de choisir entre boire ou cuisiner. L’hygiène ne fait pas partie de leurs priorités. »

Le manque d’hygiène crée des risques pour la santé : « L’environnement dans lequel nous vivons est très sale », explique Fatuma, ingénieure et représentante des femmes du camp. « Faute d’eau en quantité suffisante, les gens ne peuvent pas se laver ou laver leurs vêtements, ce qui est un énorme problème pour les enfants. »

Nadia Omar Mohammad, 30 ans, décrit les choix quotidiens qu’elle doit faire en matière d’utilisation de l’eau : « La distribution d’eau est très éloignée [de chez moi]. Je ramène deux bidons d’eau par jour pour une famille de huit personnes », explique-t-elle. « L’eau propre ne sert qu’à cuisiner, à boire et à se laver pour la prière. Nous lavons nos vêtements et nos enfants dans l’oued. C’est le seul moyen dont nous disposons pour nous débrouiller, et parfois nous n’avons même pas assez d’eau pour boire. »

Nadia Omar Mohammad, 30 ans, a amené son enfant à la clinique ambulatoire de MSF dans le camp de Metche. Tchad, 2023. © Linda Nyholm/MSF

Dans la clinique ambulatoire de MSF à Metche, le personnel a constaté une recrudescence des infections et des maladies de la peau, en particulier chez les nourrissons et les enfants. Au cours des quatre dernières semaines, 16 % des personnes traitées par MSF à Metche souffraient d’infections oculaires ou de maladies de peau telles que des éruptions cutanées, des dermatites et de la gale.

Les médecins de MSF sont particulièrement préoccupés par l’augmentation des cas de diarrhée aqueuse aiguë, surtout chez les enfants de moins de cinq ans qui souffrent déjà de malnutrition. Le mois dernier, 13 % des consultations à la clinique de MSF à Metche étaient liées à la diarrhée et aux infections digestives.

« Les maladies dont nous sommes témoins sont tout à fait évitables », déclare Marina Pomares Fuentes. « C’est un cercle vicieux : l’eau insalubre et le manque de nourriture rendent les gens malades, mais sans eau salubre, ils le sont encore plus. »

Activités de MSF dans l’est du Tchad

Les équipes MSF dans l’est du Tchad répondent aux besoins médicaux et humanitaires des personnes réfugiées soudanaises et des personnes d’origine tchadienne rapatriées dans les provinces du Ouaddaï et du Sila. Dans la province du Ouaddaï, les équipes de MSF dispensent des soins médicaux dans l’hôpital du ministère de la Santé et dans l’unité pédiatrique de la ville frontalière d’Adré, dans le camp de transit d’Adré et à la frontière elle-même. Les équipes de MSF gèrent également un hôpital dans le camp d’Ourang et une clinique ambulatoire dans le camp de Metche. Dans la province de Sila, les équipes de cliniques mobiles de MSF fournissent des soins médicaux à Daguessa et Goz Achiye et soutiennent les structures de santé.

Les spécialistes en eau et en assainissement de MSF approvisionnent les personnes réfugiées en eau potable dans trois camps : Adré, Ourang et Metche. Dans le camp de transit d’Adré, les équipes de MSF fournissent actuellement 750 mètres cubes d’eau par jour, et les gens reçoivent environ 5,5 litres d’eau par personne et par jour. Dans le camp d’Ourang, où MSF distribue également de l’eau potable, les personnes réfugiées reçoivent actuellement 8,6 litres d’eau par personne et par jour. Dans le camp de Metche, où MSF est le principal fournisseur d’eau, les gens reçoivent actuellement 6 litres d’eau par personne et par jour.