An MSF staff is preparing doses of COVID-19 vaccines at the MSF vaccination center in Bar Elias (Bekaa Valley). © Tracy Makhlouf/MSF
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Canada : Actions nécessaires à l’occasion du premier anniversaire de la dose de vaccin COVID-19

Par Adam Houston, chargé de la politique médicale et du plaidoyer de MSF au Canada.

Le 14 décembre marque le premier anniversaire de la première dose de vaccin contre la COVID-19 administrée dans le cadre du déploiement des vaccins au Canada. La première dose du vaccin de Pfizer-BioNTech a été administrée à Québec, une semaine seulement après qu’une femme de 90 ans au Royaume-Uni soit devenue la première personne au monde à recevoir le vaccin approuvé.

Aujourd’hui, plus de 85 % des Canadiens de plus de 12 ans ont reçu au moins une dose. Ces dernières semaines, l’approbation d’une version pédiatrique du vaccin de Pfizer-BioNTech signifie que les enfants âgés de 5 à 12 ans peuvent désormais rattraper leur retard vis-à-vis du reste de la population vaccinée. Le Canada vient également d’étendre l’admissibilité aux troisièmes doses pour de nombreux Canadiens.

Malheureusement, dans une grande partie du reste du monde, même une première dose est toujours hors de portée. Moins de 10 % des habitants des pays à faible revenu dans le monde ont reçu une dose de vaccin. Dans de nombreux pays, même les travailleurs de la santé qui jouent un rôle vital dans la réponse à la pandémie n’ont pas eu accès au vaccin, y compris de nombreux membres du personnel de MSF. Cette situation menace d’affaiblir davantage les systèmes de santé qui étaient déjà vulnérables avant la pandémie, en nuisant à leur capacité de faire face non seulement à la COVID-19 mais aussi aux autres enjeux de santé déjà présents, comme la tuberculose, le paludisme et les conséquences des conflits et des catastrophes naturelles.  MSF est directement témoin de ces défis dans des pays comme la Syrie, le Yémen et bien d’autres parmi les près de 50 pays à travers le monde où nous maintenons des activités spécifiques à la COVID-19.

Il y a une certaine ironie dans le fait que de nombreux Canadiens ont accès aux vaccins depuis si longtemps qu’ils deviennent maintenant admissibles aux doses de rappel, ayant reçu une première puis une deuxième dose il y a au moins six mois. Cela signifie que les efforts nationaux de vaccination ont été un succès, et il s’agit là d’une bonne nouvelle. Le Canada est maintenant l’un des pays ayant le taux de vaccination le plus élevé par habitant au monde. Mais attention : même si la vaccination se poursuit au pays, les Canadiens restent très exposés aux conséquences du manque de vaccins dans si grande partie du reste du monde. En effet, la circulation du virus au sein des populations non vaccinées augmente le risque que de nouveaux variants de la COVID-19 comme Delta et Omicron voient le jour.  Et les vaccins existants se révèlent moins efficaces contre les variants émergents.

Le gouvernement du Canada aime bien répéter des déclarations du genre « la pandémie ne sera terminée nulle part que si elle est terminée partout » et « personne ne sera en sécurité tant que tout le monde ne sera pas en sécurité ». Il reconnaît effectivement la nécessité de vacciner le monde pour protéger les Canadiens (mis à part le problème encore plus important de protéger les milliards de personnes actuellement privées d’accès aux vaccins ailleurs dans le monde), mais malheureusement il a tardé à traduire ces mots en actions.

À la même période l’année dernière, le Canada s’était approprié plus de 400 millions de doses de vaccins, presque toutes obtenues par le biais de contrats bilatéraux directement avec les fabricants. Avec plus de 10 doses par personne, le Canada est le pays qui a acheté le plus grand nombre de doses par habitant au monde. Et il a mis beaucoup de temps à les partager. En effet, le Canada n’a pris aucun engagement pour partager les doses achetées bilatéralement avant juillet, le même mois où le Canada a reçu suffisamment de doses pour vacciner deux fois chacun de ses habitants de plus de 12 ans. Bon nombre des doses reçues par le Canada en juillet reposent toujours dans des congélateurs faute d’avoir été injectées et il a attendu jusqu’en septembre pour commencer à livrer les doses promises au COVAX, le mécanisme international de distribution de vaccins. En date du 7 décembre, le Canada avait livré moins de 9 millions des 50,7 millions de doses de vaccins qu’il s’était engagé à partager avec le COVAX, et ne s’est jamais engagé à livrer une seule dose du vaccin de Pfizer-BioNTech.

 

La semaine dernière, un an après le début du déploiement des vaccins, MSF a appelé les sociétés pharmaceutiques à partager leur technologie pour augmenter l’approvisionnement mondial en vaccins. Aujourd’hui, MSF exhorte le Canada à respecter ses engagements et à prendre d’autres mesures pour accroître l’approvisionnement mondial en vaccins, par exemple en accordant son soutien à une dérogation à l’Accord sur les ADPIC. Si le Canada va de l’avant avec les troisièmes doses à l’intérieur de ses frontières sans offrir de premières doses ailleurs, cette pandémie ne va en effet se terminer nulle part.