Un membre du personnel de MSF accompagne deux personnes blessées qui se déplacent dans les couloirs de l’hôpital Nasser. Palestine, 2025. © MSF
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Palestine : à Gaza, l’instrumentalisation de l’assistance humanitaire met le système de santé en péril

Gaza délibérément asphyxiée par les forces israéliennes.

Alors que le siège de Gaza se poursuit, l’assistance humanitaire qui parvient dans la bande de Gaz demeure largement insuffisante. Ce n’est qu’un écran de fumée face aux besoins. Au cours de la dernière semaine, au moins 20 installations médicales ont été endommagées ou mises partiellement ou totalement hors service par l’avancée des opérations terrestres israéliennes. L’intensification des frappes aériennes et les ordres d’évacuation se sont généralisés, alors que les personnes ont désespérément besoin de soins et d’assistance médicale. Les autorités israéliennes doivent mettre fin à l’asphyxie délibérée de Gaza, à l’anéantissement de son système de santé, et à tout autre acte qui sous-tendent leur campagne de nettoyage ethnique, déclare Médecins Sans Frontières (MSF). 

« La décision des autorités israéliennes d’autoriser l’entrée à Gaza d’une quantité ridiculement insuffisante d’aide, après des mois d’un siège hermétique, ne sert qu’à éviter l’accusation d’affamer les gens. Elle permet à peine leur survie », déclare Pascale Coissard, coordonnatrice des urgences de MSF à Khan Younes. « Ce plan est une façon d’instrumentaliser l’aide, d’en faire un outil au service des objectifs militaires des forces israéliennes. » 

Selon les Nations Unies, 500 camions de fournitures d’aide entraient chaque jour dans la bande de Gaza avant octobre 2023. L’autorisation actuelle qui laisse entrer 100 camions par jour est tout à fait dérisoire face à une situation aussi critique. 

Pendant ce temps, les ordres d’évacuation continuent de déraciner les communautés, tandis que les établissements de santé sont soumis à des attaques intensives. 

Le 19 mai au matin, entre 6 h et 6 h 30, les équipes de MSF ont rapporté avoir entendu près d’une frappe par minute à Khan Younes. L’une de ces frappes a touché l’enceinte de l’hôpital Nasser, à 100 mètres de l’unité de soins intensifs et du service d’hospitalisation gérés par MSF. C’est la troisième fois en deux mois que l’enceinte de l’hôpital Nasser est frappée, privant une fois de plus les gens de traitements et de soins. Pour réduire les risques et assurer un minimum de sécurité, nos équipes ont été contraintes de fermer temporairement le service de consultations externes et la salle de sédation pour les gens en attente ou en convalescence. Elles ont également dû suspendre les activités de physiothérapie et de santé mentale, qui sont essentielles pour les personnes brûlées, dont la plupart sont des enfants. 

La frappe d’hier a gravement endommagé la pharmacie du ministère de la Santé à l’hôpital Nasser. Cela accroît la pression sur les approvisionnements à un moment où les réserves de médicaments sont au plus bas, en raison du siège.

Des approvisionnements essentiels sont réduits à néant par une frappe aérienne. Palestine, 2025. © MSF

Dans le cadre de l’expansion de leurs opérations terrestres, les forces israéliennes ont donné des ordres d’évacuation à grande échelle, limitant encore davantage l’accès des personnes aux soins médicaux et la capacité de MSF à offrir ces soins. Le 19 mai, par exemple, les autorités ont ordonné l’évacuation de la quasi-totalité de la partie est de Khan Younes, à la limite de l’hôpital Nasser. Les gens ont dû se déplacer immédiatement vers la zone d’Al-Mawasi. 

Le groupe de gestion des sites de personnes déplacées estime que plus de 138 900 individus ont été déplacés de force entre le 15 et le 20 mai. L’intensification des bombardements israéliens et les ordres d’évacuation à travers Khan Younes ont contraint MSF à ne maintenir que les activités essentielles dans les salles d’urgence des cliniques Al-Attar et Al-Mawasi. Depuis lundi, la clinique Al-Hakker, à Deir Al Balah, est également fermée. Les équipes de MSF y assuraient auparavant plus de 350 consultations par jour pour des soins pédiatriques, prénataux et postnataux. Elles y offraient entre autres des premiers soins psychologiques et des traitements nutritionnels ambulatoires. 

Quelques jours plus tôt, le 15 mai, les autorités israéliennes ont donné un ordre d’évacuation au centre de soins de base Sheikh Radwan, dans la ville de Gaza, ce qui a entraîné la fermeture de l’établissement. Les équipes du ministère de la Santé y offraient, avec le soutien de MSF, environ 3 000 consultations par jour dans une zone comptant environ 250 000 personnes. Il s’agissait de la dernière clinique publique de soins de santé de base entièrement fonctionnelle dans la région. 

Selon le ministère de la Santé, tous les hôpitaux publics du nord de Gaza sont désormais hors service, à la suite au siège de l’hôpital indonésien. L’hôpital de campagne de MSF à Deir Al Balah a vu son achalandage augmenter de 150 % au cours des derniers jours, ce qui l’a contraint à recruter du personnel supplémentaire et à augmenter sa capacité de base de 20 lits. Selon l’ONU, il y a actuellement environ 1 000 lits d’hôpitaux fonctionnels dans la bande de Gaza, alors qu’avant la guerre, la capacité d’accueil était de 3 500 lits. 

Les attaques contre les gens et les soins de santé doivent cesser maintenant. Les biens de première nécessité doivent entrer à Gaza en quantité suffisante, de manière à atteindre les gens qui en ont besoin. Les alliés d’Israël doivent faire pression pour autoriser de toute urgence une entrée massive de l’aide humanitaire. Chaque jour perdu témoigne un peu plus de leur complicité dans l’anéantissement des gens à Gaza.